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  • Comment choisir son terrain constructible de façon pertinente ?

Acheter un terrain ?” : “Facile, tu n’as qu’à faire le tour des agences immobilières du secteur choisi, appeler le ou les notaires et consulter les petites annonces et les sites spécialisés sur la vente de particulier à particulier.”

Comme toujours, pour beaucoup de choses lorsqu’on entend : “c’est facile, Y’a qu’à …”, c’est le grand moment de se poser les bonnes questions car le grand “Y’a qu’à …” est rarement aussi simple que prévu ou annoncé, surtout qu’acheter un terrain engage un peu plus qu’acheter une baguette !

Si quelqu’un est du style “je réagis aux coups de cœur, l’achat impulsif et ensuite j’assume” pourquoi pas … encore que, dans le cas présent, il ou elle ne sera peut-être pas seul(e) à devoir assumer.

Les bonnes questions doivent être posées avant le choix du terrain, traitant, bien sûr, du prix, mais pas que … Des points tels que les déplacements, la faisabilité du projet, l’entretien, l’environnement proche, la nature du sol, les assainissements, les réseaux d’eau, électricité, téléphone, la micro-société dans laquelle la maison (et ses occupants) vont s’inscrire doivent également être pris en compte !

Nous allons, au fil de cet article, traiter de tous ces points. Nous les avons classés de telle sorte à cibler d’abord la zone géographique, ensuite les contraintes physiques et enfin les impacts sociaux et sociétaux. Cet ordre est tout à fait arbitraire et, même s’il nous semble logique, nous ne prétendons pas qu’il doive être suivi de façon absolue.

Il nous semble important de rappeler que si une maison peut être améliorée, les contraintes liées à un terrain ne peuvent pas être changées.

Une fois le choix arrêté, commencera le long chemin dans le dédale des contraintes ou accompagnements administratifs, mais cet aspect, par ailleurs important, ne sera pas abordé ici.

Accès aux services et au travail, déplacements

Il s’agit d’un sujet déjà abordé ici sur un plan général, dans le cadre du choix du lieu d’implantation, que ce soit pour acheter de l’ancien, acheter un terrain en vue de construire ou sélectionner une location.

Sans vouloir re-développer l’article déjà cité, juste quelques rappels.

Temps consommé

Lorsque nous évoquons le temps consommé, il s’agit de celui lié aux déplacement éventuels inhérents aux obligations de se rendre au travail, de réaliser des courses; pour les enfants, d’aller à l’école; d’aller aux clubs de sport …

Coûts induits

L’implantation, proche ou non des centres d’intérêts, tant pour s’approvisionner que pour les études des enfants, les soins médicaux, la participation à des activités diverses en club ou ailleurs, aura forcément un impact sur les modes de déplacement.

Si l’éloignement implique des déplacements motorisés, ceux-ci nécessitent un service adapté (transports en commun) ou un équipement adéquat (voiture, vélomoteur, bicyclette à assistance électrique …)

Environnement

Tous ces équipements et/ou moyens de transport nécessitent des voies de circulationconsommatrices de ressources pour leur réalisation et leur entretien, ainsi que, encore très majoritairement, des carburants d’origine fossile, émetteurs de Gaz à Effet de Serre.

Il faut aussi prendre en compte la consommation de foncier agricole pour la réalisation des voies de déplacement et les atteintes ainsi portées à la biodiversité.

Contraintes liées au terrain lui-même

Topographie

Tout terrain n’est pas forcément adapté à tout projet architectural.

Comment imaginer un habitat de plain pied sur un terrain très pentu ?

Comment serait-il possible de construire une maison basée sur le bioclimatisme si le terrain est situé dans une zone dépourvue d’ensoleillement l’hiver pour cause de présence d’obstacles naturels tels qu’une montagne, de grands arbres ou d’immeubles faisant écran à l’ensoleillement ?

Nature du sol

Un terrain, c’est non seulement une surface apparente, un sol visible, il est aussi ce qui préexiste dessous.

Lorsqu’il se situe dans un lieu-dit dénommé “Le Marais” ou “La Mouille”, il y’a de fortes chances qu’il soit lui-même humide. A contrario, des noms tels que “le Rocher”, “La roche”, ‘Les Pierres” laissent espérer (ou craindre, c’est selon les objectifs recherchés) un terrain sur du rocher, certes largement porteur mais parfois très résistant, difficile à creuser.

Nos anciens l’avaient bien compris, disons plutôt intégrés. Il faut leur reconnaître que, faute de moyens mécaniques  pour creuser, ils épousaient les formes naturelles du terrain … Gageons que si, demain, nous ne disposions plus de pelleteuse et autres moyens d’excavation, nous reviendrons nous aussi au respect des courbes naturelles du sol et que nous creuserons probablement avec plus de discernement et de parcimonie.

Creuse ou pas, il faut aussi se soucier de la résistance du sol. Il faudra s’adapter à sa portance. Ceci sera à confirmer par une étude géopédologique.

Des failles naturelles, souvent visibles sous la forme de mouvements du terrain, un peu comme des vagues successives, pourront entraîner des surcoûts de soubassement.

Celui qui souhaite, et nous ne pouvons que l’encourager, produire une partie de sa nourriture, devra aussi choisir son terrain en conséquence. Quelques cailloux ne sont pas rédhibitoires, ils peuvent même stocker un peu de chaleur et/ou faciliter le drainage naturel du terrain.

Par contre, en trop grande quantité, la production de légumes deviendra vite assez difficile. Un terrain très argileux ne sera pas non plus très propice à la culture.

La présence d’un puits ou d’une veine d’eau qui permettra d’en creuser un et, ainsi, disposer d’eau gratuite, sera un plus très appréciable, tant pour les plantes que pour le porte-monnaie du jardinier.

Exposition du terrain

Bénéficier d’un ensoleillement correcte en toutes saisons sera aussi très appréciable, autant pour le moral que pour les facilités de chauffage, le confort et l’éclairement de l’habitat. Cet apport solaire sera aussi très apprécié par qui a des velléités de jardinage.

En montagne ou en zone à possibilité de fort enneigement, une exposition au soleil levant favorisera la fonte de la neige. Il faudra aussi faire attention, dans les zones à fort enneigement, à l’exposition au vent. Celui-ci peut en effet favoriser la création de congères et si dégager de la neige n’est pas une sinécure, dégager une congère est encore bien plus difficile.

Les accès peuvent aussi dépendre de l’exposition. En montagne, une route qui reste tout l’hiver à l’ombre peut s’avérer devenir pour des mois une magnifique patinoire naturelle … rigolo pour les enfants, moins pour les parents qui, parfois, devront laisser la voiture avant de telles zones ou s’équiper pour leur franchissement !

Le vent peut s’avérer un compagnon pesant et pénalisant : une façade exposée à un vent froid récurrent ou permanent se refroidira plus et nécessitera plus de chauffage pour maintenir l’habitat à un niveau de confort correct.

La proximité d’eau peut engendrer du brouillard de façon régulière, handicap majeur pour le bioclimatisme.

Risques naturels

Inondations

Le risque naturel le plus courant, et de loin, est celui des inondations.

Il est beaucoup plus prégnant pour ce qui est des habitats anciens existants que pour les terrains constructibles, censés ne pas l’être s’ils sont exposés à un tel risques avéré.  Cependant il est prudent de se renseigner soi-même plus avant, des risques dits centennaux pouvant ne pas avoir été pris en compte.

Une grande règle : là où il y a eu inondation, il y aura à nouveau, un jour ou l’autre, inondation. Telle superbe petite rivière, tel ruisseau anodins peuvent parfois se transformer, dans un temps très court, en un torrent d’eau qui envahit tout sur son passage.

La présence d’un cours d’eau n’est jamais anodine.

Il est assez facile de se renseigner sur ce risque, des cartes sont consultables. Chaque commune ou région concernée tient normalement à disposition de tels documents. Ils doivent, théoriquement, être reportés sur les plans d’aménagement locaux et autres documents tels que les PLU.

Submersion

En zone côtière, les marées peuvent accentuer les phénomènes de débordements.

Il a pu être autorisé des construction sous le niveau de la mer, derrière et sous la protection de digues.

Cette protection a pu s’avérer illusoire face aux éléments en cas de situation, certes rare, mais pas impossible de conjonction d’éléments défavorables, avec des conséquences dramatiques ayant entrainé de nombreuses morts par noyade.

L’événement le plus marquant s’est produit à La Faute Sur mer en février 2010 a créé un tel choc que nous avons la faiblesse d’espérer et de penser que les autorités responsables, partout sur le territoire, ont supprimé toutes autorisations de construire en de telles zones.

Glissements de terrain

Des lieux-dits nommés “l’Eboulis” ou ‘Le Dérochoir” sont probablement synonymes de risque de glissement de terrain (vidéo). Il y a assez peu de chance qu’une zone exposée à des risques de glissement de terrain ou d’avalanches soit classée constructible. Cependant, de tels noms doivent mettre en alerte.

Anciennes mines

Dans les zones minières ou d’anciennes exploitations de ressources en sous-sol, des galeries peuvent courir en profondeur.

Anciennes marnières

Des marnières (pdf) ont autrefois été exploitées, particulièrement en Normandie mais également dans d’autres régions. Malheureusement, elles sont souvent méconnues ou mal repérées (pdf) par rapport à la surface. C’est fort dommage car elles présentent de forts risques de tassement différentiel de terrain, synonymes de fissurations dans les bâtis, ou pire, d’éboulement…

Traits de côte

Le trait de côte (vidéo) est la limite théorique entre le domaine maritime et le domaine terrestre.

Crédit photo : Image Patrick Janicek, Immeuble « Le Signal » Souillac sur mer Gironde

Son déplacement était peu important jusqu’aux années 2000. En effet, il est dû à l’érosion des vagues, du vent et des courants marins et s’il a toujours existé, il a été amplifié par la conjonction de 2 phénomènes liés aux activités humaines.

Le 1er risque concerne la montée du niveau des océans. Elle est certaine mais il est assez difficile de prévoir de quel ordre elle sera réellement à terme de 20, 30, 50, 100 ans..

La seconde est liée à l’exploitation du sable, principalement pour des raisons de production de béton lié au ciment Portland. Les marées, les courants marins ont, de tout temps, provoqué le déplacement du sable, sans véritable conséquence car s’il en était enlevé, il en était rapporté. Cependant, suite à l’exploitation irraisonnée de ce dernier, les ressources de remplacement et de compensation n’existant plus ou de moins en moins, ces déplacements sont devenus des disparitions et … le trait de côte recule sur une grande partie du littoral.

Comme cela s’est produit pour les zones submersibles, nous serions en droit d’espérer que les autorités de tutelles prendront les bonnes décisions et qu’il ne soit plus possible de trouver de terrain constructible exposé à ce risque, en tout cas à court terme … cependant nous attirons l’attention sur le projet de loi “Elan” qui, lui, pourrait rouvrir des possibilités “fermées” par la loi littoral de 1986

Équipements

Accorder un permis de construire est subordonné au fait d’être alimentable pour faire face aux besoins vitaux (eau, électricité, téléphone, éventuellement gaz; si un réseau d’assainissement collectif existe : tout à l’égout) et joignable pour les protections essentielles (incendie entre autres, donc obligation de voie adaptée à la circulation d’engins de secours).

Viabilités à proximité

On peut parfois lire cette promesse. On peut dire qu’une telle affirmation est un “attrape nigaud”. En effet, si tel n’était pas le cas, a minima, le terrain ne serait pas classé constructible et donc pas vendable en tant que tel …

Cependant, que se cache-t-il derrière cette affirmation, quelles sont les différences avec un terrain dit “viabilisé” ?

Contrairement à un terrain “avec viabilités à proximité” un terrain viabilisé est raccordé à tous les réseaux, l’adduction d’eau, l’électricité, le téléphone, éventuellement le gaz naturel. Il est aussi raccordé au réseau de collecte des eaux usées si un assainissement collectif existe. La différence est financière. Les coûts de raccordement sont bien sûr dépendants de divers facteurs : la distance à laquelle il faut aller pour se connecter aux réseaux, la nature du sol (plus facile en pleine terre que dans du rocher !).

Si le terrain est un tant soit peu éloigné de la voie publique d’accès, une voie privée peut être exigée, en tout cas et a minima, une entrée praticable qui, souvent, implique un busage pour permettre l’écoulement naturel de l’eau dans le fossé de la voie publique.

S’il n’est pas possible d’annoncer un coût certain, nous pouvons dire qu’en 2018, faire réaliser ces raccordements à moins de 6 000 € relève de l’exceptionnel. Ça peut monter beaucoup plus haut, y compris au-delà de 10 000€..

Assainissement non collectif

Si le terrain objet de tous les désirs est situé trop loin d’un réseau de collecte des eaux usées, un assainissement non collectif sera exigé, sujet déjà abordé ici. Le système le plus simple consiste en une fosse septique et un système de filtration et d’épandage. Pour lui aussi, il est difficile d’en annoncer un coût certain, cependant il semble que, où qu’on se situe en France, il faudra, a minima, prévoir 6 à 7000 €, parfois beaucoup plus. Le coût sera variable, selon le nombre de chambres ce qui servira de base pour le dimensionnement de l’installation.

Ces installations sont encadrées par le SPANC du secteur où se situe le terrain.

Impacts personnels, sociaux et sociétaux

La situation du terrain a forcément un impact sur les occupants. Ce sujet a été abordé ici dans l’article déjà cité ci-avant, intitulé “Le lieu d’implantation de l’habitat : primordial !

Nous allons donc simplement rappeler les grands points.

Contraintes pour les occupants

Si le terrain est loin des écoles, en cas de présence d’enfants, ils pourront être contraints de se lever plus tôt pour s’y rendre.

Pour la même raison de distance importante, beaucoup de temps sera consacré aux déplacements, autant de temps qui ne sera plus disponible pour d’autres activités.

Si la surface du terrain est importante, il sera possible d’en jouir pour faire un potager, cultiver des arbres fruitiers, élever quelques animaux, y jouer … mais il faudra aussi l’entretenir !

Organisation sociétale pré-existante

Faire le choix d’un terrain d’implantation de la future maison, c’est faire le choix d’interférer avec une organisation sociétale pré-existante. Les possibilités sont, en simplifiant un maximum, de devoir s’intégrer à une société rurale ancienne, un groupe humain de néo-ruraux ou une organisation périurbaine.

Chacune de ces catégories à ses règles. Attendu qu’elle était préexistante à l’installation des nouveaux arrivants, le plus important pour eux est de ne pas l’oublier. Il leur faudra observer et, s’ils le souhaitent, se faire accepter …

Vie sociale

Une maison individuelle peut être un lieu d’exclusion, de non partage, ceci dépend du choix de chacun.

Cependant, si l’habitation d’un appartement implique le plus souvent de ne pas avoir de vis à vis et donc, de pouvoir se refermer sur soi-même, l’occupation d’une maison, généralement édifiée sur un terrain qui jouxte d’autres terrains constructibles, implique plus de possibilités de se voir, s’observer, se rencontrer …

Ce peut être une opportunité pour partager avec les voisins, échanger, aller vers les possibilités de mise en commun d’équipements , sans oublier ce qu’on nomme la “co-surveillance” des biens en cas d’absence …

Conclusion

Il est, en toutes circonstances, urgent de prendre son temps pour choisir un terrain tant il sera définitif.

Pour aider au choix et découvrir ce qui est impossible à deviner, nous vous recommandons vivement de prendre le temps de discuter, quand il y en a, avec des anciens du lieu. Ils ont vécu ici de très longue date, ils sont une mémoire vivante du non-écrit. Ils auront entendu parler de ce qui s’y est cultivé, ce qui s’y est vécu, de ce qui se passe aux environs, des facilités et difficultés prévisibles. Un peu de temps consacré, beaucoup de temps gagné !

Il est également primordial de ne pas adapter le terrain au projet de la maison, c’est lui qui, avec les aspirations et envies des futurs occupants, va déterminer l’agencement, l’architecture de la maison. Le contraire est trop souvent pratiqué …

C’est vrai qu’il est tentant de dessiner la maison, même sans le terrain, ça peut faire rêver … mais c’est un peu comme un cuisinier qui imaginerait une recette sans savoir de quels ingrédients il disposera, pas certain qu’il réussisse à sortir un plat très pertinent et inoubliable !

Crédits Photo : Pixabay, Patrick Janicek, Immeuble « Le Signal » Souillac sur mer Gironde

Claude Lefrançois


Après 30 ans dans le bâtiment, ancien charpentier, ancien constructeur, ancien maître d’œuvre, formateur dans le bâtiment, expert en analyse des bâtis anciens avant travaux, auteur de nombreux articles et d’un livre “Maison écologique : construire ou rénover” aux Ed. Terre vivante, auteur de 2 ebooks disponibles sur mon blog, je suis désormais retraité.
Je mets mon temps disponible et ma liberté d’expression à votre service : j’observe et j’analyse, au besoin je dénonce ou émet des idées.
Bonne lecture.

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