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  • « Construire durable »…Partie 2

Introduction de notre article précédent sur et autour de ce thème au sein de Batimat : “Le mondial du bâtiment (intégrant le salon Batimat), salon référence incontournable des professionnels … au regard du contenu proposé, nous ne pouvions pas laisser une telle référence continuer à nous distiller sa vision de la chose, sans apporter notre œil critique …”

Nous avons analysé et décortiqué une partie des communiqués contenus dans les 2 premières pages de la rubrique intitulée “Durable” accessible sur le site de cette vénérable institution qu’est Batimat.

Nous y avons découvert des communiqués qui présentent des solutions ou des produits qui ne nous semblent pas avoir leur place dans cette rubrique. Nous y avons aussi découvert des communiqués qui nous semblent correspondre tout à fait à l’esprit de ce que nous, Soigner l’Habitat, qualifirons de durable.

Nous vous proposons dans la suite du présent article les résultats de nos analyses.

Ce qui ne nous semble pas à sa place …

Fixation de l’isolant

Un système de fixation de l’isolant dans le cadre d’une Isolation Thermique par l’Extérieur (ITE).

Un seul équipement pour plusieurs épaisseurs, pas de percement de l’isolant, donc pas de déformation de celui-ci, ni de pont thermique causé par une quelconque cheville ou vis.

En première lecture, ça semble intéressant et … ça l’est, sauf que, d’emblée, on apprend que c’est pour fixer un isolant polystyrène.

Et, comme nous l’avons déjà développé ici dans un article précédent intitulé “Mousse isolante HFO, Greenwashing ou pas”, le polystyrène n’est pas, pour nous, un isolant qui pourrait être globalement classé dans les produits durables.

Retrouvez la suite du déroulé d’arguments dans l’article dédié intitulé “Fixation de l’isolant en ITE”.

Polystyrène protégé

Un isolant pour ITE qui se veut durable en terme de résistance à la compression. Il nous est présenté comme une solution idéale pour l’isolation des soubassements et des parois enterrées. Il dispose d’un très bon lambda, de 0,029 W/m.k. Si le produit présente des caractéristiques intéressantes, il ne peut, trouver sa place dans une rubrique “Durable”.

En effet, il est fabriqué avec des ressources fossiles, sa fabrication nécessite énormément d’énergie grise, son bilan carbone et son Analyse de Cycle de Vie (ACV) ne sont pas bons, il est très difficilement recyclable, non perspirant, ce qui peut représenter un réel handicap, particulièrement dans le cadre de la reprise d’isolation d’un bâtiment ancien en pierre, pisé ou tout autre matériau très perspirant et à fortes remontées capillaires.

Enfin, il présente des risques à prendre en compte en terme d’incendies.

Nous développons ici ces arguments de façon plus détaillée dans un article intitulé lui-même “Polystyrène protégé”.

De l’isolant en panneau pour tous les bâtiments

On nous propose, dans ce communiqué, deux isolants composites.

Le 1er, fabriqué par la société AV Composites, intègre une feuille d’aluminium et sa partie isolante est assurée par un polystyrène extrudé de forte densité, ce qui lui assure un lambda excellent de 0,028.

L’autre, fabriqué par la société RECTICEL, est composé d’une âme isolante en mousse PIR, polyisocyanurate, très proche du polyuréthane. Sa combustion ou son exposition à de très fortes chaleurs (pyrolyse dans le cadre de la combustion d’un autre produit combustible proche) provoquent un dégagement de cyanure d’hydrogène, gaz toxique de triste réputation (incendie de la tour GRENFELL à Londres le 14 juin 2017). Cette âme isolante est complétée d’un film aluminium sur une face et sur l’autre de polyester armé à la fibre de verre.

Si nous ne nions pas les qualités isolantes de ces 2 matériaux, nous rappelons qu’ils sont, l’un et l’autre, isolants grâce à des mousses issues de la pétrochimie, ce qui, combiné à la présence d’aluminium dans les 2 cas et de polyester dans un des 2 matériaux implique pour les deux de très mauvais bilans carbone, des ACV très mauvaises, une non recyclabilité (du fait des mousses isolantes en soi, mais aussi et surtout du fait de leur combinaison avec d’autres matériaux), une non perspirance, mais aussi un déphasage très médiocre, ce qui rendra les bâtiments dans lesquels ils auront été mis en œuvre relativement inconfortables l’été, particulièrement lors d’épisodes caniculaires que les climatologues nous annoncent de plus en plus fréquents.

Compte tenu de nos arguments tels que développés ci-dessus, la présence de ces 2 produits dans la rubrique “Durable” ne nous semble pas opportune.

La laine de verre innove

On nous présente une nouvelle production de la société ISOVER, une laine de verre non irritante. Pour qui a posé de la laine de verre dans le passé, c’est déjà, en soi, un net progrès. En effet, beaucoup d’entre nous ont encore en souvenir les épisodes de grattage des parties de peau exposées lors de la manipulation des isolants fibreux d’origine minérale. Un bon point !

Elle est sans formaldéhyde et sans phénol. Mais est-ce à dire qu’auparavant les laines de verre ISOVER en contenaient ? Quoi qu’il en soit, encore un bon point. Le calibrage mieux maîtrisé des fibres, l’utilisation du nouveau liant, auraient amélioré le cycle de vie de cet isolant. Donc l’ancienne laine de verre aurait eu un moins bon cycle de vie ?

Selon le site Toutsurl’isolation.com, “Il n’est pas utile d’enlever une laine sous prétexte qu’elle est ancienne, sa durée de vie est équivalente à celle du bâtiment, conventionnellement évaluée à 50 ans…” Ce site a pour propriétaire/éditeur Isover lui-même… Alors, comme disait Coluche “blanc, je sais ce que c’est, mais plus blanc que blanc, je ne vois pas …” Nous avons voulu, chez Soigner l’Habitat, en savoir un peu plus sur ces nouvelles laines qui fleurissent chez les principaux fabricants. Nous avions donc, à ce sujet, commis ici un article intitulé “La laine de verre, si révolutionnaire ?” publié dans notre rubrique “Décortication”. Vous y découvrirez qu’au final, peu de choses ont changé !

Elles nécessitent toujours autant d’énergie grise

Elles présentent des capacités de déphasage qui ne s’améliorent pas, et pour cause : elles sont d’une  densité de plus en plus faible, ce qui est un facteur aggravant dans ce domaine. Et pourtant le déphasage est très important pour le ressenti de confort.

Leur pouvoir hygroscopique est, et demeure très faible, ce qui peut être un handicap pour la gestion d’un éventuel point de rosée.

Elles ne brûlent certes pas mais ralentissent peu la transmission de la chaleur (liée au déphasage) et ne sont pas exemptes de risques sanitaires.

Au vu de tous ces points, même si nous ne nions pas les améliorations listées ci-dessus, celles-ci n’étant pas, de nature révolutionnaire, il ne nous semble pas que ce produit ait sa place dans la rubrique “Durable”.

Fibres-ciment” Eternit, un produit de façade éco-responsable

Fidèle à sa tradition de “transparence” bien connue, la société Eternit nous propose un matériau dont elle nous dit qu’il est (nous citons) :

Ecologique et respectueux de l’environnement parce que quasiment naturel (ça commence mal !), il intègre de la cellulose (bien sûr on commence par un composant qui a bonne presse), du sable, de l’eau, du ciment (mince alors, ça se gâte !), des fibres textiles dont nous ne saurons rien de plus, ni de leur nature, ni de leur source, et pour finir de l’air (quoi de plus inoffensif que de l’air !). Rappelons au passage que l’industrie du ciment est un des principaux contributeurs aux émissions de gaz à effet de serre et de consommation d’énergie fossile, tel que nous l’avons développé dans un article publié ici “Cembox, un éco-béton pas si écolo …

Laisser place à la créativité. Viennent alors des considérations plus subjectives : des couleurs toniques, idéales pour des groupes scolaires, des crèches, … la possibilité d’une utilisation en intérieur et en extérieur, laissant libre cours à la créativité des architectes !

Un matériau composite haute performance. Grâce à sa forte densité il permet d’améliorer l’inertie du bâtiment et, ainsi, en améliore la performance globale. Il résiste aux moisissures, aux champignons, aux insectes et est imperméable à l’eau. Il peut, par contre, en absorber jusqu’à 25% de son poids, contribuant ainsi à limiter les points de rosée. Nous aimerions savoir : il est imperméable à l’eau, mais est-il perméable à la vapeur d’eau ? Nous resterons ici encore sur notre faim, même après visite du site du fabricant. Dommage !

Légèreté et durabilité. Il permet de faire passer le poids d’une maison conventionnelle de 50 tonnes à 10 tonnes. Là encore, nous aimerions comprendre : s’il peut apporter de l’inertie de façon significative tel que revendiqué ci-dessus, il doit représenter une masse importante, or là il nous est présenté comme fin et léger. Une chose et son contraire en quelque sorte !

Hé bien, Mesdames et Messieurs d’Eternit, nous aimerions en savoir plus sur votre produit : son énergie grise, son bilan en cycle de vie complète, la possibilité de le recycler (toujours compliqué pour un matériau composite)…

En fait, nous ne disposons ici de rien de plus qu’une suite d’arguments commerciaux non étayés et non contrôlables car aucune fiche n’est disponible sur le site du fabricant.

Dommage, nous espérions qu’Eternit aurait évolué depuis les tristes épisodes liés à la présence d’amiante dans ses productions phares de l’époque… Il faudra encore attendre.

Ce que nous avons apprécié …

Matériaux biosourcés : bois / journaux / ouate de cellulose

La ouate de cellulose, isolant fabriqué à base de papier journal auquel on ajoute des adjuvants destinés à protéger le produit final contre les moisissures et en améliorer le comportement face au feu.

Cet isolant a un bon lambda, 0,039. Sa nature d’origine est d’être en vrac mais il est possible aussi d’en faire des panneaux, avec adjonction d’un liant pour lier les particules ensemble.

Il dispose d’un bon déphasage, son Analyse de Cycle de Vie est bonne. Son bilan carbone est excellent car, comme le bois conservé en l’état de bois, elle constitue un piège à carbone à long terme.

Sa mise en œuvre, à l’état de vrac, peut se faire par épandage à l’air libre, par insufflation sous pression ou par projection humide.

Matériaux bio-sourcés : le bois pour isolant

La laine de bois est issue du broyage de bois de sous-œuvre. Ce broyat est adjuvanté pour le protéger contre les moisissures et en améliorer le comportement au feu.

Le lambda moyen de ce genre d’isolant se situe aux environs de 0,039, ce qui le situe à un très bon niveau. Ses temps de déphasage sont parmi les meilleurs de l’ensemble des isolants disponibles sur le marché, toutes familles confondues.

Comme la ouate de cellulose, son Analyse de Cycle de Vie et son bilan carbone sont d’excellent niveau.

Sa durée de vie, tout comme la ouate de cellulose, est très bonne, bien au-delà des 50 années conventionnelles de certaines autres familles. C’est un  isolant très facile à recycler.

A nouveau, comme la ouate de cellulose, c’est l’un des meilleurs produits de lutte contre la propagation du bruit.

Les panneaux de laine de bois peuvent être produits avec des densités très variables, ce qui la rend apte à des emplois dans des situations aussi diverses que dans les murs, par l’intérieur ou par l’extérieur, en toiture ou en compression sous des panneaux de plancher.

Béton de chanvre

Il nous est présenté comme naturellement isolant et avec de bonne capacités d’étanchéité. Nous pensons que ce produit est excellent mais nous ne lui accorderons pas, d’emblée, le qualificatif d’isolant. Son lambda n’atteint que péniblement le niveau minimal requis pour y prétendre, source : le livre “L’isolation Thermique Ecologique” de JP OLIVA, et S COURGET, publié aux Ed. Terre Vivante.

Par contre il apporte une bonne effusivité, améliorant ainsi considérablement le rayonnement de parois peu favorables sur ce plan, entre autres les murs en pierre de bâtisses anciennes.

Les bétons de chanvre sont naturellement très perspirants et ils permettent donc d’améliorer le confort ressenti du fait du rayonnement des murs anciens tout en favorisant la migration de la vapeur de l’eau de l’intérieur vers l’extérieur. Ses qualités, dans ce domaine, permettent aussi aux remontées capillaires auxquelles ces murs sont très souvent sujets à facilement s’évaporer. Il est nécessaire, pour ce faire, que le béton soit réalisé avec 100% de chaux, sans aucune adjonction de ciment et nous sommes surpris que le fabricant de la chaux citée, Nathural, à savoir la société Lafarge, se sente obligée de préciser que cette chaux n’en comporte pas. De là à penser que certains autres produits de la marque, vendus pour de la chaux, en comprendraient …Pour notre part, nous précisons qu’à notre connaissance d’autres fabricants de chaux n’éprouvent pas le même besoin de précision car, chez eux, aucune ambiguïté; la chaux est de la chaux …

Le bâtiment s’adapte à son époque et devient réversible

Il ne s’agit pas ici de nous présenter un produit ou une technique, mais de nous parler d’une tendance : il devient évident que rénover est au moins, si ce n’est plus pertinent que détruire et reconstruire.

Pour nous il ne fait aucun doute que faire vivre l’ancien, en l’améliorant certes, est une voie qu’il nous faut approfondir tant elle est pertinente à de multiples points de vue.

Auto-consommation : capter l’énergie en façade

C’est de l’exploitation d’un emplacement très largement disponible aux fins d’y produire de l’électricité grâce à de nouvelles avancées technologique dont on nous parle.

L’emprise des fermes de panneaux photovoltaïques n’est pas négligeable et les surfaces de toit exploitables pour leur implantation sont, par nature, limitées. C’est donc avec grand intérêt que nous suivons toute proposition, telle que celle-ci, visant à exploiter les immenses surfaces vitrées de nombre d’immeubles contemporains..

Nous sommes très sensibles à cet aspect de la production d’énergie là où elle sera consommée, limitant ainsi les pertes en ligne.

Conclusion

Comme nous vous le disions en début de cet article et comme développé dans ces colonnes, nous avons trouvé des sujets de satisfaction et des sujets d’insatisfaction dans cette rubrique “Durable” du site batimat 2017.

Nous soulignons bien volontiers que, si quelques produits se sont retrouvés, par inadvertance, erreur, manque de vigilance ou défaut d’analyse, dans la rubrique “Durable”, de très nombreux matériaux ou présentations de tendances ou mouvements nous y semblent présents en toute légitimité..

Nous allons continuer, au fil des semaines et mois à venir, à commenter les communiqués de la “vieille dame” et espérons ainsi satisfaire vos attentes et éclairer les diverses publications du point de vue du 1er média participatif entièrement au service de la construction ou de la rénovation pertinente.

Claude Lefrançois


Après 30 ans dans le bâtiment, ancien charpentier, ancien constructeur, ancien maître d’œuvre, formateur dans le bâtiment, expert en analyse des bâtis anciens avant travaux, auteur de nombreux articles et d’un livre “Maison écologique : construire ou rénover” aux Ed. Terre vivante, auteur de 2 ebooks disponibles sur mon blog, je suis désormais retraité.
Je mets mon temps disponible et ma liberté d’expression à votre service : j’observe et j’analyse, au besoin je dénonce ou émet des idées.
Bonne lecture.

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