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  • Doit-on végétaliser les villes ?

Tout fout le camp, les espèces animales et végétales disparaissent les unes après les autres, le dérèglement climatique nous prive de la régularité (qui a toujours été relative) des saisons, l’air est pollué, tant celui des intérieurs que l’extérieur, les moineaux, les fameux “piafs” de Paris, ont quasi déserté les villes, faute d’espaces pour nicher et de nourriture pour survivre… C’est donc vrai… tout fout le camp !

Et le tableau n’est pas fini : il fait de plus en plus chaud, les canicules rendent la vie insupportable. Si, tel que le chantait Charles Aznavour, “la misère serait moins pénible au soleil”, la chaleur du soleil semble plus pénible en ville !

L’étanchéification des surfaces permet une parfaite collecte des eaux pluviales qui sont vite et bien transportées aux effluents naturels … accentuant ainsi les risques de crues en même temps qu’elle prive les terrains de leur capacité à capter l’eau.

Les habitants des villes, angoissés (malheureusement ils ne sont pas les seuls), aspirent à bénéficier d’un environnement moins anxiogène et en capacité de calmer leurs angoisses.

Les végétaux ont la faculté de calmer, les arbres particulièrement. 

Alors s’il vous plaît, plantez des arbres, semez de l’herbe, égayez nos vies avec de la verdure, cachez cette architecture verticale amplificatrice de nos mal-être et, tant que nous y sommes, pourriez-vous svp aller un peu plus loin, non seulement ne pas accentuer nos pathologies, mais nous en guérir, ou en tout cas y participer ?

Alain Sarfati, architecte et membre de l’Académie d’architecture l’a parfaitement décrit.

L’apocalypse on vous dit ! Alors, que peut-on faire ?

Mais c’est bien sûr, substituer de la nature à l’absence de nature.

Voyons, qu’est-ce que la nature : les petits oiseaux, les papillons et … Mais, tout a déjà été prévu, en tout cas selon la bible :

Le premier jour, la terre n’étant que chaos, Dieu sépara la terre et le ciel et créa la lumière.

Le deuxième jour, il créa une étendue entre les eaux pour les séparer les unes des autres , il y eut alors la terre et l’eau.

Le troisième, il produisit de la verdure, de l’herbe et des arbres …

Suffit les références bibliques !

Nous en sommes à un moment où, indéniablement, raison divine ou humaine, nous cherchons à rendre la ville plus accueillante, tant visuellement que thermiquement : beau projet !

Le sujet est très vaste et nécessite d’être développé, ce qui nous a imposé ce long article.

Pour ceux qui disposent de peu de temps ou souhaitent aller directement à l’essentiel, il est possible de se limiter à la synthèse, il sera toujours possible de revenir au développement ultérieurement.

Cet article sera suivi d’un autre dans lequel les solutions alternatives seront abordées.

Préalable

Une maison, un immeuble, habitable, tertiaire ou autre, nécessitent d’être étanches à la pluie.

Le plus simple pour y parvenir est d’opérer avec des matériaux étanches à l’eau et mis en œuvre en pente afin d’en favoriser l’écoulement.
Cette fonction d’étanchéification est très souvent assurée soit par des couvertures en tuiles ou plaques minérales (toits en pente) posées avec recouvrement en “entuilage”, soit par une couverture métallique style zinc, composée de plaques mises en œuvre à joint debout, soit par une étanchéification bitumineuse ou, plus récemment, en EPDM, ceci généralement sur des toitures plates.

Traditionnellement aucune de ces surfaces ne recevait le moindre végétal et donc, particulièrement l’été, les calories étaient captées et, selon la conception du bâti et la composition de leurs éléments, pouvaient être stockées dans les toits.

Du fait de la concentration qu’elle induit, la ville a accentué le stockage des calories puisque le pourcentage des surfaces incriminées est bien supérieur à ce qui peut se rencontrer partout ailleurs. Ces effets sont accentués par le traitement des sols, lesquels, toujours en ville, présentent des pourcentages bétonnés ou bitumés extrêmement importants, là encore bien supérieurs à ce qui se rencontre ailleurs.

Principes de fonctionnement de l’inertie

Tous les matériaux, selon leur chaleur spécifique et selon leur densité, ont une capacité déterminée à accumuler des calories : c’est ce qu’on appelle l’inertie thermique

Tout matériau exposé à une source de chaleur en emmagasine, de façon variable selon ses caractéristiques…

Plus sa chaleur spécifique est élevée (chaleur nécessaire pour faire monter de 1° Celsius 1 kg du produit) et/ou plus il est dense (nombre de kg par m3), plus le matériau pourra accumuler des calories.

L’été, lorsque les conditions sont requises, tout élément exposé au soleil capte une partie de son rayonnement (vidéo), sauf à l’en protéger (ceci est abordé plus avant).

En ville, le cumul des surfaces très denses (dalles en béton, dallages divers, enrobé, asphalte, pavés, graviers…) engendre d’énormes capacités de stockage.

Comme tout élément chaud (au-dessus du zéro absolu, -273°C), ces dernières échangent des calories par rayonnement (vidéo). Celui-ci est dépendant de leur effusivité.

Lorsque les conditions changent et que la température ambiante est inférieure à celle des éléments précités, ceux-ci, en fonction de leur diffusivité, relâchent leurs calories dans l’atmosphère.

Plus la diffusivité est élevée plus vite le matériau se “déleste” des calories stockées. Même si le béton et autres éléments minéraux ont une diffusivité élevée et donc relâchent vite les calories, leur masse en fait des émetteurs sur de nombreuses heures.

Le cumul de ces faits entraîne une montée de la température de l’air ambiant en relation avec les volumes de matériaux accumulateurs : on a baptisé ces zones “îlots de chaleur”.

Moyens de lutte contre l’inertie de ces éléments

Ils sont de plusieurs ordres.

  • Une solution parmi d’autres : la réduction des effets délétères en limitant l’arrivée du rayonnement jusqu’aux éléments susceptibles de stocker les calories.
  • Ce qui semble surprenant mais n’est pas, d’emblée, envisagé : tendre vers l’élimination, chaque fois que possible, des éléments générateurs de ces situations.
  • Une troisième voie serait possible et semble ne pas intéresser les chercheurs… ou alors ils sont peu nombreux et n’ont pas droit à la parole : capter ces calories et les exploiter.

Réduire les éléments générateurs d’inertie à leur strict minimum

Cette solution est tellement évidente et basique que… beaucoup l’ont oubliée !

  • Serait-ce l’influence de courants tels que “la pensée Corbusienne”, de mode architecturale d’apurement des lignes, de mise en avant de matériaux prétendument  ceci ou cela ?
  • Serait-ce la demande des habitants des villes qui veulent des accès rapides, en tous lieux, facilement, sans se mouiller ni se salir les chaussures ?
  • Serait-ce la volonté des élus locaux voulant rendre la ville “propre”, “pure”, d’en faciliter l’entretien ?
  • Serait-ce dû à une vision particulière du développement et de l’organisation des villes, avec des zones différenciées : pour l’habitat, pour les services, pour le commerce, pour le sport et les loisirs, pour le travail… imposant, de fait, des déplacements très nombreux ?
  • Serait-ce pour des raisons purement mercantiles de développement du marché du béton et des enrobés, asphalte et autres, puissantes industries, très bien organisées et qui ont su se doter de lobbyistes performants ?

Peu importe les raisons qui nous ont amenés à la situation actuelle, le dérèglement climatique, qui va bien sûr amplifier les phénomènes, doit nous inciter à changer soit de comportement, soit, carrément, de mode de pensée.

Limiter les effets délétères des éléments générateurs

Cette option prend pour hypothèse la conservation (voire la création) d’éléments susceptibles de générer ce qui a été décrit ci-avant dans les rubriques “Préalable” et “Principes de fonctionnement de l’inertie”.

Tel que nous l’avons écrit ci-avant, diverses solutions permettent d’influer sur le stockage des calories.

Nous allons, dans cet article, nous limiter à l’analyse de la végétalisation, les autres solutions, à savoir le travail sur l’albédo ou la voie de captation des calories et d’utilisation à notre profit faisant l’objet d’un autre article.

Au-delà de la lutte légitime contre les effets “îlots de chaleur” et contre la transmission de la chaleur dans les habitats, source évidente d’inconfort l’été dès lors que la température ambiante intérieure est trop élevée, la solution végétalisation présente divers avantages et inconvénients.

Les avantages et diverses capacités de la végétalisation

Attendu qu’aucun élément n’est dissociable d’un tout, nous allons, tel qu’annoncé dans le titre de cet article, aborder la végétalisation globale des villes et non pas limiter nos propos à la végétalisation des toits.

Confort

A plusieurs titres, les végétaux sont source de confort, particulièrement l’été.

Rafraîchissement

Par sa simple présence, la végétation engendre de l’ombre, nous pouvons nous mettre à l’abri des arbres, ce qui limite la captation du rayonnement solaire et améliore notre ressenti de confort. De même et à moindre échelle, les fleurs, l’herbe, apportent de l’ombre au support dans lequel elles s’enracinent, la terre au sol, les substrats sur les toits, et limitent donc leur montée en température par arrêt du rayonnement solaire direct.

La végétation, du fait de son évapotranspiration (de l’eau liquide s’échappe des plantes, plus ou moins selon leur nature, peu des cactus et beaucoup de certains feuillus par exemple), libère de l’eau qui, sous l’effet de la chaleur, s’évapore.

Nous sommes ici face à un changement de phase qui engendre un échange entre les émetteurs (la végétation) et son environnement (l’air).

Cependant, pour produire de l’ombre les plantes doivent rester vivantes et, pour ce faire, ont besoin d’eau. Ce point crucial est développé ci-après, rubrique “Inconvénients”.

Déphasage

Nous l’avons souvent écrit dans ces colonnes, le lambda, sacro-sainte valeur mise en avant par les tenants des isolants conventionnels comme seule digne d’une vraie prise en compte, est intéressant pour les économies de chauffage mais n’a qu’assez peu d’influence sur le confort.

Attendu que l’été, bien évidemment, on ne chauffe pas, c’est donc vers d’autres capacités qu’il faut aller chercher le confort.

Le déphasage (vidéo) est, sans aucun doute possible, un des facteurs principaux de ressenti de confort (nous lui ajoutons la teneur en eau de l’air ambiant, exprimée par l’humidité relative, ainsi que la gestion des ouvertures et/ou le renouvellement d’air).

Derrière ce mot, le déphasage, se cache la mesure du temps nécessaire pour qu’une calorie passe d’une face à l’autre d’un produit ou d’une paroi.

L’été, le rayonnement solaire direct sur les éléments minéraux lourds engendre une forte montée en température de ces derniers.

Les présences conjuguées d’un substrat en face extérieure en capacité d’accumuler ces calories et la présence de végétation qui génère de l’ombre vont, indéniablement, ralentir le transfert vers l’intérieur.

Isolation l’hiver

Nous entendons parfois dire que l’hiver, un substrat et une végétalisation sur un toit participent de l’isolation.

Oui, tout matériau, même du granit ou du béton, a une capacité isolante, mais de quel niveau ?

Nous dire que quelques centimètres d’un substrat minéral et quelques herbes aident à limiter les pertes de calories est vrai, mais nous présenter la chose comme étant significative revient à nous prendre pour des lapins de trois semaines.

Pour rappel, isoler c’est limiter le volume de fuites de calories dépendant exclusivement du lambda du matériau et de son épaisseur : de la terre mouillée n’est surement pas un isolant digne de ce nom !

Donc non, la végétalisation l’hiver n’est pas un plus pour l’isolation !

Fixation du carbone

Nous émettons beaucoup de carbone du fait de nos activités et nos consommations. Ces émissions sont liées à des stades divers, depuis ce qui aura été nécessaire pour fabriquer, installer, entretenir et recycler les divers équipements qui nous entourent, y compris l’intégralité des bâtiments, utilisés ou pas (vides ou occupés), jusqu’à ce qui sera nécessaire à son exploitation. On nous parle beaucoup de l’exploitation et du chauffage des habitats, mais notre impact ne s’y limite pas.

Nous utilisons des équipements pour nous déplacer, lesquels doivent aussi être construits, des voies équipées pour y circuler, et de l’énergie pour propulser les engins.

Bref nous émettons beaucoup de Gaz à Effet de Serre (GES), dont du carbone.

Un élément végétal est constitué en partie de carbone, et donc en stocke dans sa composition. 

Les végétaux, selon la façon dont ils sont cultivés, engendrent aussi une fixation de carbone dans la terre.

Le carbone fixé par les plantes, en elles-mêmes… ne le sera qu’aussi longtemps que les plantes n’auront pas été consommées, brûlées ou compostées, alors que celui fixé dans les sols le sera… définitivement (on parle de carbone vivant pour celui nécessaire à la vie sur terre, et de carbone mort, à l’image du pétrole par exemple, pour ce qui concerne le second) !

Ressourcement

La vue de la végétation est apaisante, toute une faune y vit, de l’oiseau qui picore les graines ou y collecte des insectes, aux abeilles qui y butinent, en passant par les chats qui y trouvent un exutoire. 

Il s’en exhale diverses odeurs, ça piaille, ça chante, ça ronronne, ça nidifie, ça égaie par les touches de couleur des fleurs, ça marque les saisons au fil de l’évolution des feuillages… ça maintient un lien avec la vie dans sa globalité.

C’est peut-être un peu de tout ça qui fait que beaucoup de gens se sentent mieux dans la nature que dans le béton

Production agricole

Essayer de nourrir la population d’une ville avec des installations au plus près des lieux de consommation est un projet louable. Nous ne pouvons que le soutenir, mais un peu d’objectivité ne nuit pas. 

On nous vante de plus en plus la production agricole en ville, les fameuses fermes urbaines ! 

Il est aberrant d’imaginer des fermes urbaines pour autre chose que le fun, souhaiter produire quelques fraises, poireaux, salades qui seront consommés localement est bien sûr une chose que nous ne pouvons que défendre.

Tout au plus s’agit-il de rêves qui permettront de faire prendre conscience aux urbains que la production agricole est plus complexe que l’application de conseils collectés ici ou là, au fil de lectures d’ouvrages et/ou visionnages de vidéos, et ni aussi simple que de mettre des équations de rendement dans des tableurs.

Nous n’aborderons pas, ici, les serres à étages multiples, avec substrats sur plateaux, véritables délires de solutions high-tech et extrêmement coûteuses en matériaux de construction, totalement dépendantes d’énergie électrique pour les gérer et d’eau extérieure pour les alimenter, il y aurait trop, beaucoup trop à en dire. 

De plus, à notre avis, elles n’entrent pas vraiment dans la rubrique “végétalisation” tant elles sont artificialisées.

Rétention des eaux de pluie

Les plantes, arbres, graminées et autres, du fait de leurs systèmes racinaires et des supports qui leur sont nécessaires, particulièrement sur les toits plats, retiennent une partie des eaux de pluie.

Ceci en régule les apports dans les ruisseaux, rivières et fleuves et participe ainsi à limiter les risques d’inondation.

Inconvénients

Qu’impose la végétalisation ?

La végétalisation présente aussi des inconvénients

Où plante-t-on : toitures végétalisées

Faire pousser quelques fraisiers, poireaux, ou salades sur un toit, oui, c’est possible.

Prétendre y planter des arbres fruitiers relève d’une profonde méconnaissance de ce qu’est un arbre : il doit s’enraciner profondément pour aller puiser l’eau dont il a besoin là où elle se trouve. Bien sûr, des arbres à basse tige ont été développés, à force de sélections et de greffes, dont les racines restent en surface et donc se satisfont d’un substrat peu épais. Cependant, ils génèrent eux aussi de l’ évapotranspiration, laquelle est inhérente au simple fait qu’ils sont vivants. 

Où plante-t-on : contre les parois verticales

Là, on atteint au sublime ! Le substrat ne peut même plus se maintenir en place par gravité, simplement en le posant sur un support, il faut équiper les murs d’équipements qui le porteront.

Des appareillages divers allant de sortes de goulottes horizontales à des poches en toile plastique imputrescible assurent cette fonction. Là encore, ils portent en eux leurs parts de consommation de ressources et d’émission de GES du fait de leur fabrication, mise en œuvre et entretien.

Et que dire de l’apport d’eau et de l’entretien des précieuses plantes ?

La pluie ne peut bien évidemment pas y suffire et le peu de substrat possible entraîne une obligation d’irrigation quasi continue… 

Bonjour la gabegie à la fois énergétique, en matériaux et financière ! Le plaisir des yeux coûte cher !

Solidité de l’ouvrage

Lorsqu’on envisage de végétaliser un toit-terrasse, il faut y installer un substrat. 

Pour que des plantes y vivent, ce substrat doit être humidifié en permanence… Tout ceci représente un poids certain, lequel doit être porté par les éléments inférieurs, piliers, murs, dalles.

Cette ambition de végétalisation engendre donc de facto un surdimensionnement des infrastructures de l’immeuble.

Ce surdimensionnement va engendrer des dépenses supplémentaires, non seulement financières, mais aussi en consommation de ressources (essentiellement fossiles) lesquelles ne seront plus disponibles pour les générations futures.

Tous ces matériaux supplémentaires seront générateurs de GES du fait de leur fabrication, de leur transport et de leur mise en œuvre. Ils augmenteront le volume de déchets à recycler au moment de leur fin de vie

Appel à la pétrochimie

En cas de végétalisation d’un toit-terrasse, il faut bien évidemment assurer une étanchéité du support.

Cette étanchéification est assurée avec des matériaux tous issus de la pétrochimie. 

  • Est-il nécessaire de rappeler ici que la pétrochimie consiste en l’exploitation d’une ressource fossile, le pétrole ? 
  • Est-il nécessaire de rappeler également que l’exploitation du pétrole engendre un relâchement dans l’atmosphère de carbone piégé depuis plus de 300 millions d’années
  • Est-il nécessaire de rappeler que le carbone est un GES ? 
  • Est-il nécessaire de rappeler que ce GES participe au dérèglement climatique ?

Hors une des justifications de la végétalisation est… la fixation du carbone

Le pire est que, si la végétalisation permet de fixer du carbone, cette captation, au moins pour la partie matière des végétaux, est infiniment moins durable que celle du pétrole si on le laisse là où il est, sans l’extraire !

L’honnêteté nous amène aussi à dire que, en ce qui concerne la nécessité d’étanchéification, végétalisation ou pas, il faut la réaliser, alors où est l’inconvénient ? 

Il réside dans le fait que si aucune végétalisation n’est envisagée, il est possible d’assurer l’étanchéité avec des couvertures beaucoup moins “polluantes” à terme et moins consommatrices de ressources… Parmi ces couvertures, citons les tuiles, tôles…

Il lui faut de l’eau

Tel que nous l’avons décrit ci-avant, les plantes ont besoin d’eau pour leur survie ainsi que pour l’évapotranspiration.

En cas d’implantation sur un toit elles vont puiser cette eau où ?… Dans la dalle ? Bien sûr que non. Dans le substrat. 

Parfait, et ce substrat, s’il ne pleut pas, où trouve-t-il son eau !

C’est simple, via l’irrigation.

Bravo ! Belle idée : il va falloir puiser de l’eau en bas, dans des rivières et fleuves à débit de plus en plus faible, au point qu’on doit fermer des centrales nucléaires, dans l’incapacité que l’on est d’en assurer le refroidissement.

Quant aux nappes phréatiques, elles sont elles-mêmes au plus bas. 

Et quand bien même on disposerait d’eau en bas, il va falloir la faire monter au sommet des immeubles. Nous nous rendons tributaires de pompes elles-mêmes tributaires d’une alimentation en électricité !

Certains prônent de stocker l’eau de pluie lorsqu’elle est excédentaire. C’est effectivement possible mais s’il s’agit de l’eau du toit lui-même végétalisé, cette eau sera, au mieux (quoique…) à un étage inférieur car il lui faudra rejoindre le réservoir par gravité. Le “quoique” tient aux faits que, d’une part, cette eau devra être remontée, donc besoin d’une pompe, d’autre part, si le stockage est assuré vers le sommet de l’immeuble pour éviter des pompes trop puissantes, il occupera une surface qui ne sera plus disponible pour d’autres usages

Enfin, qui dit stockage d’eau dit charge supplémentaire, donc encore un renfort de structure et, cerise (pourrie ?) sur le gâteau, aussi longtemps que le(s) réservoir(s) sera(ont) étanche(s), tout ira bien, mais lorsque l’âge et le “travail” de l’immeuble aidant, des fuites apparaîtront, que fera-t-on ?

Parce que tous ces problèmes, principalement la surface consommée, sont pris en compte, aucun stockage de ce type, digne de ce nom, n’a jamais été réalisé en même temps qu’une végétalisation d’un toit.

Donc, si stockage il y a, logiquement, sa seule implantation est : au sol… Et on retrouve alors la contrainte de la remonter !

Durabilité

Pour que l’exploitation du bâti soit possible dans le temps et la durée, tout équipement, tout agencement, qui y contribue nécessite un entretien.

Les étanchéités de toitures-terrasses sont parmi les techniques qui nécessitent des interventions régulières d’entretien et de réparation.

Ce sont aussi parmi les moins durables. Il n’est pas rare, pour ne pas dire qu’il est courant, de devoir les refaire après 25 à 30 ans de bons services.

S’il est simple d’intervenir sur un toit seulement “équipé” d’un peu de gravier, en le stockant ou en l’évacuant, il en ira tout autrement sur un toit végétalisé, surtout s’il est “exploité” en tant que zone de production agricole : les plants seront en place, peut-être des plantes permanentes, le substrat sera plus épais et… la fuite sera continue car ils ont besoin d’eau en permanence !

Nul doute que les coûts d’entretien seront beaucoup plus importants avec ce genre de toit.

Synthèse

En admettant la nécessité de végétaliser tout ce qui peut l’être, de redonner la place à la nature et de réimplanter la vie où nous l’avions enlevée en artificialisant les sols, il est important de se poser quelques questions, sauf à agir aveuglément et sans le recul nécessaire.

Doit-on végétaliser en ville ?

Qui oserait dire que sa végétalisation est inutile ? Pas nous en tout cas, bien au contraire. Il faut bien évidemment la végétaliser.

Nous développons ci-après comment, selon nous, l’envisager.

Végétalisation naturelle

Il s’agit pour nous de celle qui est conforme à ce que la nature a toujours fait : developpement au sol.

Des arbres peuvent être plantés le long des rues, tel que le baron Haussmann l’avait imaginé dans ses célèbres avenues.

Ces hautes frondaisons apporteront de la fraîcheur l’été par leur évapotranspiration et de l’ombre pour les équipements en dur qui seront conservés : trottoirs, allées et/ou rues, piétonnières ou destinées à la circulation de véhicules. Elles limiteront aussi l’action directe du soleil sur une partie des façades.

Des parterres peuvent être aménagés le long des rues, lesquelles, chaque fois que possible, doivent être rendues aux piétons et cyclistes, limitant ainsi la largeur de circulation. Les surfaces de parking récupérées peuvent devenir des parcs enherbés et arborés.

Certains nous diront qu’il s’agit là d’autre chose que de végétalisation : relevant plutôt d’urbanisation et de la politique de développement de la ville ainsi que des modes de déplacements qu’il faudrait privilégier. 

Nous sommes en partie d’accord, en partie seulement, car de ces politiques dépendent les surfaces bétonnées ou asphaltées lesquelles, comme développé ci-avant, sont à l’origine des phénomènes qui sont à la base de la réflexion qui ont amené à la végétalisation

Dans ce domaine comme dans tant d’autres, si nous limitons les problèmes à la source, nous limitons aussi le besoin de les résoudre…

Avantages

Si les plantes sont judicieusement choisies, le plus souvent cette implantation leur permet de s’autosuffire en eau en puisant dans le sol. 

Les nécessaires arrosages auxquels nous nous sommes habitués sont dus au fait que la plupart des parterres sont occupés par des fleurs choisies pour leur harmonie, pour l’éclatement des couleurs au fil des saisons, ceci sans aucun souci d’adéquation aux conditions climatiques et hydriques naturelles du lieu.

Besoin d’eau

Non seulement en cette situation il est faible mais, de plus, s’il est avéré, l’eau se situe à la même altitude; il suffit d’une pompe de faible puissance pour la mettre légèrement sous pression.

Si nous voulons être prudents et faire face à des risques de besoins éventuels d’eau supérieurs aux ressources, il suffit d’en assurer un stockage dans des citernes souples ou, mieux, dans des mares et autres bassins naturels creusés à même le sol. En plus d’être peu onéreuses, ces installations de rétention de surface peuvent contribuer à la vie de toute une faune sauvage, contribuant ainsi à la conservation de la biodiversité

Même si ces bassins ne sont pas toujours pleins, ils pourraient devenir d’excellents points de ressourcement pour les urbains, havres de communion avec une nature semi-sauvage. 

Vent

C’est le seul type de végétalisation qui permet de gérer relativement facilement les risques en cas de vent violent, bourrasques, tempêtes tel que nous l’avons déjà connu fin 1999 avec celle dénommée Lothar. Pour rappel et mémoire, les bourrasques extrêmes mesurées à Paris : 169 km/h et en moyenne sur la moitié Nord de la France aux environs ou au-delà de 150 km/h.

On nous dit qu’elles vont être de plus en plus courantes…

Entretien

Si la taille est nécessaire, elle y sera beaucoup plus aisée qu’en hauteur

Il en va de même pour tous les soins éventuels

Et que penser de la gestion en fin de vie ? Si le besoin s’en fait jour, est-il disposition plus simple pour abattre un arbre qu’à même le sol naturel ?

La faune et la flore

L’ensemencement du sol par apport de graines par le vent ou les oiseaux, collées à leur plumage, à leurs pattes, ou colportées par leurs fientes, est naturel.

Le travail des vers de terre y est gratuit et d’une rare efficacité, favorisant l’aération des sols.

Les oiseaux, les écureuils et tant d’autres petits animaux s’épanouissent sur les gazons, dans les parterres, dans les frondaisons des arbres, s’appropriant un biotope très proche de celui qu’ils pourraient rencontrer à la campagne, pour le plus grand bonheur des humains.

Inconvénients

Nous n’en voyons pas.

Végétalisation artificielle

Il s’agit pour nous de toute plantation dans un substrat rapporté, ce qui n’est pas le cas au sol puisqu’il s’y trouve de la terre arable.

C’est par contre le cas de toutes les plantations réalisées en hauteur, sur les toits des immeubles, des bâtiments tertiaires, commerciaux ou industriels.

Avantages

Elle peut, indéniablement, améliorer esthétiquement l’aspect de certains bâtiments.

Inconvénients

Structure

Pour supporter le surpoids généré pas le substrat, la rétention d’eau et les plantes, il faut renforcer les structures.

Ceci impose une consommation supérieure de ressources, lesquelles étant forcément limitées, risquent de manquer aux générations futures.

Le surcoût engendré limite l’achat à ceux qui ont les moyens d’y faire face. 

Entretien

Il est infiniment plus compliqué d’entretenir tant le complexe d’étanchéification que les plantes elle-mêmes (taillage, éventuel abattage…).

Besoin d’eau

Hormis si la pluie est régulière et en quantité suffisante, il faut irriguer

Les besoins y sont, par nature, beaucoup plus grands qu’au sol. Il faudra “monter” l’eau à grande hauteur et en grande quantité, à une époque où les rivières, fleuves et nappes phréatiques sont au plus bas et qu’a priori cette situation risque de devenir la norme…

Conclusion

A-t-on pu autrefois, selon les circonstances qui pouvaient l’imposer, accepter des toitures en pente végétalisées ? 

Oui, on l’a fait.

Peut-on aimer les toitures plates, les toitures-terrasses, les toits végétalisés, pour des raisons esthétiques ? 

Oui, on peut, alors, pour ceux qui aiment, qu’ils le fassent … mais qu’ils cessent de nous le vendre pour de mauvaises raisons :

  • Prétendre ainsi atténuer les îlots de chaleur est en partie vrai, mais il est possible d’y parvenir autrement, solutions abordées ici.
  • Prétendre écrêter l’eau : en partie vrai, mais possible autrement, plus simplement.
  • Prétendre apporter du déphasage, vrai, mais possible autrement et plus simplement.
  • Prétendre isoler : non !
  • Prétendre capter du CO2 : vaste enfumage !!!

La réalité :

  • Consommation de ressources fossiles : oui !
  • Consommation d’eau : oui !
  • Entretien important : oui !
  • Difficultés importantes à terme (assez court) : oui !

Et donc, s’ils le font, qu’ils s’apprêtent à en assumer les conséquences !

Alors, révolution ou greenwashing ? 

A n’en pas douter, en grande partie du greenwashing !

Soyons sages :

Nous conseillons la végétalisation au sol, la captation et la rétention des eaux de pluie… également au sol. Pour compenser le transfert de chaleur au travers des toits, utilisons des matériaux à fort déphasage. Pour limiter les montées en température des volumes en capacité d’accumulation, travaillons sur leur albédo et/ou exploitons les calories qu’ils captent … mais nous avons abordé ceci dans un autre article.

Crédits Images : Wikipedia Rafiq AzamSuperbus~commonswikiLamiot Pxhere 123,  Pixabay ID 12019,  cocoparisienne

Claude Lefrançois


Après 30 ans dans le bâtiment, ancien charpentier, ancien constructeur, ancien maître d’œuvre, formateur dans le bâtiment, expert en analyse des bâtis anciens avant travaux, auteur de nombreux articles et d’un livre “Maison écologique : construire ou rénover” aux Ed. Terre vivante, auteur de 2 ebooks disponibles sur mon blog, je suis désormais retraité.
Je mets mon temps disponible et ma liberté d’expression à votre service : j’observe et j’analyse, au besoin je dénonce ou émet des idées.
Bonne lecture.

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