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  • Isolant écographite premium, greenwashing ou non ?

Voici un produit qu’on nous présente comme innovant, performant, vertueux … alléchant!

Ses performances semblent excellentes, allant d’un lambda de 0,029 à une bonne perméance à la vapeur d’eau en passant par une résistance au feu de 1er ordre puisque présenté comme ignifuge. Il permet même d’économiser du carbone.

(source Wikipédia – photo de graphite brut)

Son emploi : déversement en combles, insufflation en cavités fermées, en complément à titre d’agrégat léger et isolant dans des bétons

Qu’en restera-t-il après une analyse dans le détail ?

Ecographite premium

(Voir ci-dessous Edit du 08/04/2018)

Extraits de la communication du site Kenzaï

Est-ce la révolution annoncée?

Ses qualités réelles :

  • excellent lambda : 0,029
  • sa nature de billes de petites dimensions ne bloque pas les échanges gazeux au travers des parois,
  • il est très léger : 16 Kgs/m3
  • imputrescible,
  • hydrophobe,

Toutes ces qualités en font un produit isolant intéressant.
En le mettant sous le microscope, qu’y trouve-t-on ? Quelques points qu’il semble intéressant d’analyser. Voyons tout cela dans le détail.

Il n’est pas question de dire que ce produit est mauvais, simplement rétablir quelques vérités et demander des éclaircissements sur quelques points.

Il vont être présentés dans l’ordre chronologique de découverte sur l’article.

Un point qui doit être apprécié avec précaution

Le lambda :

Nul doute que ce lambda annoncé soit juste en laboratoire, cependant, en l’absence de confirmation de la méthode de relevé et de mesure par le CSTB ou de certification par l’ACERMI, il faut être prudent sur sa réalité par rapport à d’autres produits concurrents qui, eux, afficheraient des résultats contrôlés et confirmés par ces organismes de tutelle.

Quelques explications sont nécessaires :

  • le chiffre annoncé est le résultat d’une moyenne de mesures et d’arrondis, ces arrondis peuvent être faits vers le haut ou vers le bas,
  • dans une palette de mesure, il peut être possible d’éliminer les plus extrêmes, ça peut influer,
  • selon qu’un suivi régulier est assuré par le CSTB, que le fabricant dispose ou pas d’un lambdamètre, qu’il accepte les règles de mesure du CSTB, sa valeur peut être dégradée jusqu’à 0,02 qui lui sont ajoutés. Par exemple, la valeur de 0,029, si elle est effectivement conforme aux règles du CSTB, pourrait, malgré tout, en cas de non suivi, se voir ramenée à 0,031, ce qui très différent. Il serait bien de comparer ce qui est comparable.

Un autre point interpelle :

(Voir ci-dessous Edit du 24/04/2018)

extrait du site : “L’écographite est un isolant neutre sur la santé et l’environnement obtenu par expansion de carbone avec un simple agent expansif et de la vapeur d’eau (75% d’air)”.

À la première lecture, il semble que cet isolant soit très peu énergivore et il est annoncé neutre sur la santé et l’environnement. Deux questions :

  • …un simple agent expansif…” : c’est quoi ce simple agent expansif ? Il serait bon qu’on nous le cite ou décrive.
  • …expansion de carbone avec un simple agent expansif et de la vapeur d’eau”(75% d’air) : n’y a-t-il besoin que d’un peu de vapeur d’eau ou le graphite n’a-t-il pas besoin d’être porté à une certaine température, maintenu sous atmosphère protégée pour éviter qu’il ne s’enflamme ? Il est évident que le besoin en énergie pour la production pourrait être très différente pour un cas ou l’autre.

Il serait bon que les choses soient clairement dites : nature de l’agent expansif, mode de fabrication réel.

Les points qui posent vraiment problème

Stable dans le temps :

(Voir ci-dessous Edit du 24/04/2018)

Extrait de l’article du site : “Ses qualités lui permettent de rester stable dans le temps.
Tant mieux si tel est le cas, mais cette stabilité est-elle toujours certaine, avant et après mise en œuvre ? N’y a-t-il pas des contraintes particulières pour l’assurer ? Il semble que l’écographite soit assez proche, au moins pour le graphite, des polystyrènes graphités.
Or le polystyrène graphité est réputé assez instable aux UV, au moins pour sa partie graphite. Une preuve ? … Une publication de la FFB à destination de ses adhérents : Isolants graphités : gare au soleil : FFB

Sain :

(Voir ci-dessous Edit du 24/04/2018)

Extrait du site : “– sain, de part une composition neutre chimiquement (aucun impact sur la santé et l’environnement, classement A+), ne représente, contrairement aux isolants types polystyrène, aucun risque cancérigènes.”

Plusieurs remarques :

(Voir ci-dessous Edit du 24/04/2018)

  • le classement A+ concerne les COV, or la définition même des COV n’intègre pas toutes les substances volatiles qui peuvent se trouver dans l’air. Cette classification est bien mais n’apporte pas de garantie absolue d’innocuité au plan risque cancérigène. Par ailleurs, les COV sont loin d’être tous recherchés et ne sont donc pas tous trouvés. Nous avons étudié ces faits ici dans un  article intitulé :  « COV, ce qu’on ne nous dit pas« .
  • …contrairement aux isolants de type polystyrène …” cette affirmation laisse entendre que les polystyrènes seraient cancérigène, ce qui n’est absolument pas confirmé par L’Agence Internationale de Recherche sur le Cancer : L’écotoxicité du polystyrène – Nacicca

Il n’est pas question, avec ce développement, de rouler pour la pétrochimie, simplement les choses doivent être justes …

Eco-performant :

Extrait du site : … “Sa chaleur spécifique (permettant le calcul du déphasage) est supérieure à celle du polystyrène : 1450 J/kg.K contre 1200 pour le polystyrène. Il permet donc un meilleur confort en été.” Selon le livre de JP OLIVA, “L’isolation Thermique écologique”, publié par les éditions Terre Vivante, les valeurs de chaleur spécifique du polystyrène sont différentes de celles annoncées ici :

  • polystyrènes expansés : 1450 J/kg.K
  • polystyrènes extrudés : valeurs moyennes de 1300 à 1500 J/Kg.K, valeur courante : 1450 J/kg.K,

Ce qui mettrait l’Ecographite prémium au même niveau que les polystyrène et n’en fait pas des produits très performants face au déphasage et donc au confort d’été.
Il est édifiant, à ce titre, de le comparer à 2 références dans ce domaine, toujours selon les mêmes sources :

  • laine de bois : 1700 à 2300 J/Kg.K
  • ouate de cellulose : 1600 à 2100 J/Kg.K

Durable :

(Voir ci-dessous Edit du 24/04/2018)

Extrait du site : “Il est enfin ignifuge (Euroclasse E).”

Classement feu européen en catégorie E

Les 2 tableaux ci-dessus montrent clairement qu’un classement feu européen en catégorie E est l’équivalent de l’ancien classement français en catégorie M4, c’est à dire facilement inflammable. Il faut quand même un bel aplomb pour annoncer qu’un matériau facilement inflammable est ignifuge !

Ecobilan :

(Voir ci-dessous Edit du 24/04/2018)

Extrait du site : “Par son origine et par sa masse, ECOGRAPHITE est :

  • Le produit le moins polluant du marché, (chaque sac de 300 litres utilisé c’est 3 kg de carbone de moins dans l’atmosphère), neutre chimiquement”

1ère affirmation peu crédible :

  • Le produit le moins polluant du marché” : le moins, c’est bien en comparaison d’autre chose, alors, comparativement à quels autres isolants? sur quelles bases?

2ème affirmation guère plus crédible :

  • chaque sac de 300 litres utilisé c’est 3 kg de carbone de moins dans l’atmosphère” :

– comme pour l’affirmation précédente 3 Kg de carbone en moins dans l’atmosphère : par comparaison à quoi ?
– mais surtout : c’était du carbone fixé et stabilisé depuis le carbonifère, plus de 300 millions d’années. Après transformation, aujourd’hui c’est encore du carbone, dont acte, mais où est le gain ? Comparons avec des isolants d’origine végétale, le carbone qui y est fixé a été capté récemment dans l’atmosphère, contribuant ainsi à en limiter la présence. Là oui, il y a un bilan positif.

Conclusion :

Ce produit n’est pas inintéressant mais il est bien loin d’être la révolution annoncée.

[Edit 08/04/2017]

Depuis la publication de cet article, le produit nous avait semblé avoir disparu corps et âme. Il nous avait semblé avoir été remplacé par Isosphère premium, produit pour le moins très proche si ce n’est, a priori et selon les images, une plus forte charge de graphite, et qui aurait pu expliquer le gain en lambda. Après contrôle, le lambda annoncé n’est pas un lambda confirmé par un laboratoire COFRAC et c’est celui de la meilleure de 5 éprouvettes différentes … méthode qui n’est pas celle préconisée par le CSTB ou l’ACERMI et qui mettrait probablement en évidence des différentes importantes entre le 0,026 indiqué par Isosphère et la valeur qui en serait reconnue par les dites autorités de certification.

Ecographite Prémiun … suite !

Alors que nous pensions que ce produit avait disparu, il n’en n’est rien. Il existe toujours. Pour le trouver il faut désormais se rendre sur le site du fabricant Montaigne Technology. Il nous semble important de préciser ici que le site présente 3 matériaux : des billes de polystyrène, graphité ou non, des billes dites de bioplastique, graphité ou non et des billes à base de carbone. Ce sont bien ces dernières qui sont appelées Ecographite.

[Edit 24/04/2017]

Suite aux précisions apportées par l’entreprise Montaigne Strategy,

fabricant et commercialisant le produit Ecographite, réponses apportées par M de Cadier de Veaunes, Directeur Général de l’entreprise, non pas en réponse sur notre site Build Green à notre commentaire du 9 avril 2018 dans lequel nous posions 6 questions, mais par courriel adressé au rédacteur, Claude Lefrançois, nous tenons à faire notre mea culpa sur les points suivants :

  • la composition du produit Ecographite est, contrairement à nos dires initiaux dans l’article de base, extrêmement majoritairement à base de carbone,
  • le carbone en question n’est pas, tout au moins directement, issu du carbonifère mais extrait de suies industrielles filtrées à la sortie des cheminées industrielles,
  • Ecographite ne comporte pas, comme nous en demandions la précision dans un de nos commentaires, en date du 9 avril 2018  (question N° 1) , de poussières de carbone lors du travail initial de mise en œuvre, ce qui élimine, à ce moment là, tout risque cancérigène,
  • nous demandions également dans nos questions (question N° 3) si, compte tenu de la composition des suies (30 à 50% qui ne seraient pas du carbone), Ecographite est exempt de ces dérivés divers et peu analysés par ailleurs. Nous savons désormais que seul le carbone est gardé et que les divers autres éléments, sels tout particulièrement, sont triés et non intégrés car ils gêneraient la maîtrise de l’expansion du produit. Donc la composition est connue et maîtrisée,
  • l’Ecographite ne comporte pas d’ignifugeant (notre question N° 6 dans le cadre du commentaire sus-daté) et ne présente donc pas de risque d’émanation liée à un produit supplémentaire, ceci ni dans le cadre d’un incendie, ni dans celui d’une éventuelle pyrolyse.

Toutefois, il n’en reste pas moins que notre avis général demeure

La pertinence du produit sur le bâti, les occupants et pour l’environnement ne change pas : nous le considérons comme intéressant, mais non révolutionnaire et non dénué de risques sur les plans suivants :

  • souligné par notre question 1 : des réponses nous ont été apportées mais qui ne correspondent pas à notre question, entre autres, réponses faisant état de directives européennes sur l’innocuité du produit au moment de sa commercialisation, or nous posions la question par rapport à ses éventuels vieillissement et dégradation,
  • à notre question 2 liée à la présence ou non de polystyrène dans les billes d’Ecographite, la réponse sous-tend que non, mais une réponse plus simple et claire qui dirait : non, il n’y en a pas, nous aurait mieux convenu,
  • à notre question N°4 liée au recyclage éventuel du produit utilisé à l’état de vrac et le nécessaire non mélange de diverses matières différentes, nous ne considérons pas avoir obtenu une réponse nette. En effet, n’ayant pas eu de réponse nette et claire à la question N°2 et, ayant appris tel que rappelé ci-après dans des dires de M de Cadier de Veaunes, DG de Montaigne Stratégy (extrait de l’email sus-cité envoyé au rédacteur, Claude lefrançois, le 22 / 04 / 2018 en réponse (partielle) à sa question N°1 dans son commentaire ci-dessous en date du 09 / 04 / 2018), “… exposé au soleil l’emballage constitué de sacs en polypropylène se dégradent aux UV …” Cette présence de polypropylène n’est-elle pas de nature à gêner le recyclage éventuel de l’Ecographite ?

Nous entendons par recyclage un emploi autre que finir en tant qu’éventuel combustible …

  • si le carbone n’est pas directement issu de la transformation de graphite stocké depuis le carbonifère, il y a quand même de fortes chances qu’il soit issu de la filtration d’énergie fossile brûlée dans des fours industriels ou autres installations. Et il est fort probable que le combustible brûlé sera, lui, issu d’une ressource stockée depuis le carbonifère (dérivés de pétrole, charbon …). Alors si c’est moins mal que de relâcher du CO2 directement dans l’atmosphère, nous ne considérons pas que c’est un progrès immense que de le piéger ainsi, c’est au mieux, à nos yeux, réduire un mal … Dit autrement, le raisonnement ici serait  “puisque ce déchet existe, autant le valoriser”. Le nôtre va dans une autre direction. Nous espérons en l’émergence d’un nouveau paradigme qui consisterait non plus à valoriser un déchet mais à ne pas le produire. Nous nous inscrivons ainsi plus dans l’orientation globale de sauvegarde de notre planète. Nous avons su le faire pour les sacs jetables, pourquoi ne pas tendre plus globalement vers cette tendance ?
    Nous avons d’ailleurs abordé ici ce problème de production de CO2 non pas dans le cadre de la vie de la planète, au rythme normal du cycle classique “émission/consommation” du CO2, mais en relâchant du CO2 piégé au carbonifère et qui, de fait, devient excédentaire … une des causes, selon nous (et pas que nous d’ailleurs !), du dérèglement climatique actuel.

Sachant que l’entreprise Montaigne Industry n’a pas répondu clairement à certaines de nos question liées aux points suivants :

  • Souligné dans la question 1 et, en résumé, dont le fond était : “ y a-t-il risque, lors d’un vieillissement dû aux UV (ou pour d’autres raisons par ailleurs), de dégradation de ce que vous appelez le corps noir (à savoir le graphite expansé) et de voir ce graphite, à un moment ou un autre, retrouver sa nature de poussière ?”

En effet, si tel était le cas, ce que nous espérons ne pas être, il serait alors bon de savoir si cette poussière serait de nouveau à risque cancérigène certain tel que le CIRC les a déjà, initialement, classées. ».

La réponse de Montaigne Industry, via un mail reçu de son DG, M de Cadier de Veauce, est : “C’est un tout autre problème : exposé au soleil l’emballage constitué de sacs en polypropylène se dégradent aux UV, et les billes en tant que corps noir en l’absence du sac ont tendances a emmagasiné la chaleur et a réduire un peu de volume (augmentation  de la masse absolue de 10 -15 % au-delà de 80°C) donc petite perte de volume et dégradation du lambda”, ce qui ne répond pas réellement à notre question.

  • à notre question N°5 liée au classement feu, pour rappel, B S3 d2, nous avons eu une réponse qui fait état de l’inflammabilité de l’Ecographite au delà d’une certaine température, ce qui correspond bien au symbole B. Par contre,
    • Nous souhaitions préciser ce que veut dire le S3 : beaucoup de fumées, émises en quantité et vitesse;
    • Autre précision sur le d2 : n’étant ni d0, ni d1, présence de débris dont l’enflammement dure plus de 10 secondes, combien de temps ? le classement ne le précise pas.
    • Il s’agit, pour nous, d’un classement assez mauvais, tant au niveau des émissions de fumée que de la persistance et de la propagation possible du foyer d’incendie.
    • nous avons eu un développement qui stipule que le produit est autorisé en emploi lors de manifestations publiques diverses …
  • d’où notre question N°6 liée à la présence ou non d’un ignifugeant quelconque. Nous avons bien noté que la réponse est non, pas d’ignifugeant, ce qui n’est pas de nature à nous rassurer compte tenu, entre autres, des émissions de fumées et de la persistance d’enflammement des débris au-delà de 10 secondes …

Donc, sauf à recevoir des réponses plus claires ou complètes aux questions sus-relevées, nous maintenons nos dires d’origine : produit non dénué d’intérêt mais bien loin d’être la révolution annoncée !

Claude Lefrançois


Après 30 ans dans le bâtiment, ancien charpentier, ancien constructeur, ancien maître d’œuvre, formateur dans le bâtiment, expert en analyse des bâtis anciens avant travaux, auteur de nombreux articles et d’un livre “Maison écologique : construire ou rénover” aux Ed. Terre vivante, auteur de 2 ebooks disponibles sur mon blog, je suis désormais retraité.
Je mets mon temps disponible et ma liberté d’expression à votre service : j’observe et j’analyse, au besoin je dénonce ou émet des idées.
Bonne lecture.

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