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  • Le déphasage thermique, son fonctionnement, ce qu’il apporte
Le déphasage, à quoi ça sert ?

Le déphasage est le temps nécessaire à une calorie pour passer d’une face d’un matériau à l’autre face

En terme de confort, le déphasage est à la thermie ce que le couple est aux moteurs thermiques.

Je vous propose une vidéo qui image bien comment fonctionne le déphasage.

Comprendre le déphasage thermique

Parallèle 

Un véhicule doté de beaucoup de chevaux mais d’un faible couple pourra rouler très vite sur une route plate mais aura de grandes difficultés à monter les côtes.

Un habitat isolé avec des matériaux dotés uniquement d’un très bon lambda (λ) mais sans réelles capacités de déphasage aura une action correcte pour limiter le coût de chauffage l’hiver mais sera très médiocre dans ses capacités à gérer les flux de calories l’été, particulièrement au niveau des toits.

Conséquences

Depuis que les canicules deviennent de plus en plus régulières, longues, importantes et produisent leurs effets sur l’ensemble du territoire, il apparaît évident que se prémunir contre le froid l’hiver est infiniment plus simple que se prémunir contre la surchauffe des habitats l’été.

Moyens l’hiver

L’hiver, pour avoir chaud dans un habitat alors qu’il fait froid à l’extérieur, il suffit de s’habiller chaudement ou de chauffer l’intérieur.

On chauffe pour compenser les fuites de calories.

Pour qui ne veut pas se vêtir lourdement (par goût) ou chauffer trop (généralement pour des raisons économiques, parfois pour des raisons de confort car chauffer n’est pas la voie royale pour bénéficier d’un confort important, ceci sera abordé dans d’autres articles et d’autres vidéos), il faut limiter les fuites.

Ceci se fait en isolant et, en partie, en s’appuyant sur le lambda de l’isolant.

Le lambda est fiable jusqu’à 23 °C, température de l’isolant à partir de laquelle il commence à se dégrader. Au-delà de 27°, il devient très aléatoire.

L’hiver, où qu’ils soient situés, les isolants n’atteignent pas ces températures, donc, à cette saison, isoler avec des produits à bon lambda est une solution pertinente.

Moyens l’été

Le déphasage
Le déphasage

L’été, le fonctionnement est inversé, il ne s’agit plus de conserver des calories à l’intérieur de l’habitat mais d’empêcher qu’elles y pénètrent.

La source de production des calories est le soleil, c’est l’époque où sa course est la plus longue et, surtout, la plus élevée. Les parois les plus impactées par son action sont donc les toits.

Règles de bon sens

  • lorsque le soleil pénètre à l’intérieur par les menuiseries, il apporte son lot de calories, il faut donc arrêter le rayonnement solaire par tout moyen adapté (arbres à l’extérieur qui font de l’ombre, stores, volets, pergolas, avant-toits…),
  • lorsque l’air est chaud, il faut l’empêcher de pénétrer dans l’habitat, donc fermer les menuiseries extérieures.

Autres actions

On ne peut pas empêcher la migration de la totalité des calories, il faut donc la limiter par des actions multiples.

Une partie peut être renvoyée par renvoi du rayonnement solaire. C’est le mode opératoire des isolants dit réfléchissants. Cependant une partie du rayonnement aura quand même été captée par les éléments de couverture ou d’étanchéité, ce qui limite leur action car les matériaux qui s’en seront chargé montent en température et transmettent une part de ces calories par conduction et convection, modes de transmission contre lesquels lesdits isolants ne brillent guère par leurs performances.

Une calorie ne peut se situer qu’en un lieu, que dans un élément.

Il est donc intéressant de disposer de matériaux en capacité de la stocker au lieu de la transmettre.

Selon les lois physiques, le froid attire le chaud.

Le jour, lorsque le soleil brille de tous ses feux, il fait plus frais à l’intérieur qu’à l’extérieur. L’arrêt du rayonnement solaire engendre une montée en température des matériaux qui auront arrêté ses rayons

Le toit est la partie la plus exposé, il capte beaucoup de calories et, l’été, il n’est pas rare de mesurer plus de 70 °C sous une couverture sombre

Il est opportun alors, plutôt que laisser migrer ces calories, de miser sur leur captation et leur stockage momentané dans des matériaux jusqu’à atteindre la nuit, moment où, attirées par la fraîcheur nocturne, elles repartent en partie dans l’air ambiant extérieur, plus froid, et, pour une autre partie, sont attirées par l’effet radiatif du cosmos.

C’est ce que certains essaient de faire avec des toits végétalisés. Les végétaux en réduisent l’albédo (simplification extrême : captation des rayonnements solaires) et le substrat de culture stocke les calories. Si, en plus, ce substrat contient de l’eau, l’évaporation de celle-ci va “consommer” de l’énergie, donc de la chaleur.

On peut aussi atteindre l’objectif de stockage momentané des calories en choisissant des matériaux ayant les qualités requises. Les isolants peuvent assurer cette fonction.

Ils doivent disposer d’une chaleur spécifique élevée (énergie nécessaire pour faire monter en température un matériau) et d’une densité de mise en œuvre également élevée

Cette qualité se mesure en joules nécessaires pour faire monter 1 kg de produit de 1 kelvin (K).

Il faut assez peu de calories pour chauffer des matériaux à base de minéraux.

Par exemple 1 kg de verre nécessite entre 850 et 1000 joules, selon le type et la qualité du verre, pour gagner ce K. Des roches telles que le granit, le calcaire et tant d’autres, y compris des bétons au ciment Portland, nécessitent 1000 joules, les bois, selon les essences, nécessitent de 1600 à 2500 joules, l’eau en nécessite 4190

En terme d’isolation, après transformation et adjuvantation, les laines de verre ou de roche ont une capacité thermique massique moyenne de 850 à 1000 joules, les isolants végétaux affichent des valeurs de l’ordre de 1700 à 2300, disons environ le double.

Puisque ces capacités thermiques massiques sont exprimées par rapport à 1 kg de matière, la densité de mise en œuvre vient compléter les performances des matériaux.

La combinaison des deux est ce qu’on appelle… le déphasage.

Les laines de verre affichent des densités faibles, de l’ordre de 12 à 14 kg/m3 pour les produits en vrac et de l’ordre de 28 à 30 kg/m3 pour les présentations en panneaux.

Les isolants végétaux affichent, en vrac, des densités qui vont de 25 à 40 kg, et ceux en panneaux vont de 40 à 60 kg, voire beaucoup plus pour les versions denses.

A la fois pour ce qui concerne leur chaleur spécifique et pour leur densité de mise en œuvre, à mode de présentation identique, les isolants végétaux ont des valeurs environ du double.

Le déphasage
Le déphasage – apport de fraîcheur

Conclusion

Un bon déphasage se situe au-delà de 10 heures, atteindre 12 heures est l’idéal. Chercher plus ne sert à rien au plan thermique, et il en sera ainsi… aussi longtemps que l’amplitude quotidienne sera de 24 heures !

L’hiver le lambda seul d’un matériau peut suffire à atteindre des performances isolantes correctes (sachant que l’isolation permet d‘atteindre une température ambiante donnée en chauffant moins). Cependant, si l’objectif recherché est aussi un bon confort, alors de nombreux autres critères sont à prendre en compte.

L’été il ne s’agit plus de garder les calories à l’intérieur mais de les empêcher d’y pénétrer.

Comme expliqué ci-avant, le déphasage est dépendant, d’une part, de la capacité thermique massique (ou chaleur spécifique, ces deux terminologies décrivent la même chose) des composants du matériau et, d’autre part, de la densité de mise en œuvre de ce matériau.

  • Les isolants d’origine végétale affichent des valeurs qui sont environ du double dans les deux cas et, fatalement, en combinant les deux, on aura des performances plus que doublées dans ce domaine spécifique qu’est le déphasage.
  • Les isolants d’origine pétrochimique bénéficient d’une chaleur spécifique inférieure à ceux d’origine végétale déjà évoqués, par contre leurs densités, à l’égal de ceux d’origine minérale, sont également faibles

A cause de ces spécificités, ils ne sont pas non plus très performants en terme de déphasage

Enfin (et peut-être surtout), du fait de leurs lambdas de très haut niveau, ils sont généralement mis en œuvre en moindre épaisseur, donc avec de moindres quantités de matière en capacité de stockage : ce qui est présenté comme un avantage devient alors un inconvénient… 

Sur divers autres plans, allant de leur origine à leur recyclabilité réelle, de leur perspirance aux risques d’émanations diverses, ils présentent de nombreux autres inconvénients.
Au milieu de la multitude des questions qui se posent lors du choix des techniques ou des matériaux à privilégier pour améliorer un habitat, j’espère vous avoir aidé dans la sélection des isolants et ainsi accéder au confort le plus élevé possible, particulièrement l’été, en prenant en compte que c’est alors le déphasage qui prime sur les autres critères, y compris le lambda.

Crédit photos : Bessi,  ybernardi,  PhotoMIX-Company,

Claude Lefrançois


Après 30 ans dans le bâtiment, ancien charpentier, ancien constructeur, ancien maître d’œuvre, formateur dans le bâtiment, expert en analyse des bâtis anciens avant travaux, auteur de nombreux articles et d’un livre “Maison écologique : construire ou rénover” aux Ed. Terre vivante, auteur de 2 ebooks disponibles sur mon blog, je suis désormais retraité.
Je mets mon temps disponible et ma liberté d’expression à votre service : j’observe et j’analyse, au besoin je dénonce ou émet des idées.
Bonne lecture.

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  1. Très intéressant une fois de plus mais je n'arrive pas à l'appliquer à mon isolation. J'ai fait mettre en décembre 2019, une isolation en laine de coton sur le plancher de mes combles (40 cm). J'espérais un meilleur confort en été (j'habite dans le Var) mais je n'ai pas constaté une vraie différence ! je suis déçue et je n'arrive pas à l'expliquer, qu'en pensez-vous ??
    Merci Cordialement

    1. Le déphasage ne peut pas tout, il faudrait une analyse holistique : y-a-t-il une étanchéité au vent suffisante ? les menuiseries ont-elles été tenues fermées ? le rayonnement solaire a-t-il été coupé au niveau des vitrages exposés ? …

  2. Bonjour,

    Merci beaucoup pour votre article, vraiment très intéressant, instructif, et très bien expliqué !
    Je suis en plein choix et dimensionnement des matériaux pour la rénovation de ma maison, cela va beaucoup m'aider.

    J'ai toutefois une question concernant le choix des matériaux pour isoler les rampants des combles.
    Serait-il pertinent de mettre en place une isolation sous toiture bi couche composée comme suit :
    – une première couche sous les voliges, de laine de bois (ou autre matériau végétal avec fort pouvoir de déphasage), de manière à absorber la chaleur l'été
    – une seconde couche en laine de verre, avec un lambda plus important pour contrer les déperditions de l'hiver ?

    D'avance merci pour votre retour,

    Bien cordialement,
    Alexandre

    1. Bonjour Alexandre.
      En ce qui concerne l’été, la mise en place d’un isolant végétal apportant un déphasage de 12 heures se suffit à elle même et… elle apporte une performance l’hiver amplement suffisante.
      Le cumul de deux isolants ne présente donc pas d’intérêt.
      Les chiffres et le raisonnement à l’appui :
      12 heures de déphasage avec de la laine de bois, selon le densité, c’est environ 20 à 25 cm, avec de la ouate de cellulose ce serait environ 25 à 30 cm.
      Leur lambda est de l’ordre de 0,040, le R atteint va donc de 6 environ à 7,5.
      Je sais que le grand sport est, désormais, la chasse au R le plus élevé possible, mais ceci n »est absolument pas pertinent, ni au plan économique (dépenses inamortissables dans des temps raisonnables, disons moins de 30 ans), ni au plan des ressources (tout matériau utilisé est fabriqué à partir d’une ressource et devrait, théoriquement, permettre l’économie soit de la même ressource, soit d’une autre mais, en tout cas, générer un bénéfice au plan du bilan global, ce qui devient très vite inatteignable), ni au plan énergie car toute fabrication, toute mise en œuvre se fait grâce à de l’nerf-gie et, sur ce plan, il est évident que très rapidement, au-delà de R = 5 à 6, la consommation ne sera jamais compensable…

      Je vous conseille le visionnage de 2 de mes vidéos :
      – (jusqu’où isoler raisonnablement ?)https://www.youtube.com/watch?v=A1hSjkHnrCY&t=408s
      – (Les bonnes questions en matière d'(isolation) https://www.youtube.com/watch?v=QbI-SD8X0IA&t=310s

  3. Bonjour,

    Vraiment très intéressant et surtout très complet, MERCI.
    A propos des résultats donnés par certain, il faut prendre en compte pleins de paramètres comme le positionnement de la maison, etc.

    Claude

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