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  • Pourquoi l’étanchéité à l’air des bâtis est-elle primordiale ?

Qui n’a pas ressenti des courants d’air désagréables qui, même en l’absence de vent et bien que faibles déclenchent un sentiment d’inconfort ? Ou peut-être vous êtes-vous demandé pourquoi votre facture de chauffage reste élevée malgré vos efforts pour isoler ? L’étanchéité à l’air des bâtis, cette grande oubliée des rénovations classiques, pourrait bien être la clé de voûte d’un habitat véritablement performant et confortable.

Après 30 ans passés dans le bâtiment, avec l’appui de nombreux habitologues, nous avons pu constater que cette question est souvent mal comprise, voire complètement négligée, alors qu’elle est fondamentale pour créer un habitat sain, économe et agréable à vivre.
Nous allons la développer dans la suite de cet article.

Le principe fondamental : la chaleur nous échappe toujours

Pour bien comprendre l’importance de l’étanchéité, il faut d’abord saisir un principe physique incontournable : la chaleur cherche toujours à migrer vers les zones froides. C’est une loi naturelle contre laquelle nous luttons constamment quand nous chauffons nos maisons : tout comme dans un autre domaine le pôle négatif attire l’électricité du pôle positif, le froid attire le chaud (vidéo).

Prenons un exemple concret : un poêle est allumé dans une pièce. Ce poêle chaud rayonne et émet des infrarouges qui sont captés par les parois de l’habitat. Simultanément, l’air à proximité du poêle se réchauffe, se dilate et, devenant plus léger, monte vers le plafond. Arrivé au contact des parois froides (murs extérieurs, toit), cet air cède sa chaleur aux éléments rencontrés (meubles, murs, toit), se refroidit, se contracte et redescend. C’est ce qu’on appelle un cycle convectif ou une cellule de convection (vidéo), ce mouvement perpétuel de l’air qui transporte la chaleur.

Or, ce n’est pas tout ! Les calories reçues par les parois extérieures cherchent naturellement à migrer vers l’extérieur par conduction (vidéo) à travers les matériaux. Plus cette migration est rapide et importante, plus il faut chauffer pour compenser les pertes et maintenir une température confortable. Ce phénomène est amplifié par un facteur souvent méconnu : l’air intérieur chauffé est légèrement sous pression (certes très faiblement, mais suffisamment) et cherche à s’échapper par toutes les micro-fuites de l’enveloppe du bâtiment.

Les défauts d’étanchéité à l’air : ces passoires invisibles

Ces micro-fuites, résultant des défauts d’étanchéité au vent, sont comme des milliers de minuscules trous dans une coque de bateau. Individuellement, ils semblent insignifiants, mais leur effet cumulé peut transformer une maison en une véritable passoire énergétique !

Et où trouve-t-on ces fuites ? Partout où les matériaux se rencontrent : jonctions entre murs et planchers, pourtour des menuiseries, passages de gaines électriques, trappes d’accès aux combles, prises électriques sur murs extérieurs… La liste est longue et les chemins empruntés par l’air sont souvent insoupçonnés.

A contrario d’une idée reçue tenace, ce n’est pas l’isolation qui résout ces problèmes, mais bien l’étanchéité à l’air. Nous avons visité des centaines de maisons très bien isolées mais non étanches, où les performances énergétiques restaient décevantes. Pourquoi ? Parce que l’air qui s’échappe court-circuite littéralement l’isolation !

Une fuite d’air ponctuelle est source d’eau dans la paroi

Tout gaz sous pression qui fuit se détend, c’est-à-dire que sa pression diminue. Ce phénomène physique s’accompagne d’un autre phénomène qui, lui, provoque une baisse de la température de cet air “fuyard” en dessous de la température ambiante générale (phénomène courant lorsque l’on purge le réservoir d’un compresseur avec apparition d’un glaçon à l’extrémité du purgeur… même par canicule !).
Donc, non seulement de l’air chaud fuit de façon non contrôlée mais, dans le même temps, cette condensation fait ponctuellement chuter la performance isolante du matériau traversé… jusqu’à des niveaux insoupçonnés, presque 5 fois moins pour une fuite de 1mm de large sur 1 mètre de long, ce pour une surface étudiée de 1m2 (cf test réalisé par l’institut de physique du bâtiment de Stuttgart Efficacité énergétique | pro clima France).

L’étanchéité à l’air et l’humidité : un couple à maîtriser

Cependant, l’étanchéification d’un bâti soulève immédiatement une autre question cruciale : celle de l’humidité. En rendant notre habitat plus hermétique, nous devons gérer différemment la vapeur d’eau produite à l’intérieur.

Nos activités quotidiennes, menées dans notre habitat, génèrent une quantité surprenante d’humidité : la cuisine (cuisson des aliments), la salle de bain (douches), la lessive et, parfois, le séchage du linge étendu sur un séchoir, le simple fait de respirer, et même la transpiration libèrent de la vapeur d’eau dans l’air ambiant. Pour se donner une idée concrète, imaginons un lave-linge, un sèche-linge et une panière à linge empilés, occupant environ 0,7 m3. Ce volume correspond approximativement à 1 kilogramme d’air à 19°C. Si cet air comporte, sous forme de vapeur d’eau, l’équivalent de 2 cuillères à café d’eau, soit environ 7g, son taux d’humidité relative (HR) est de 55% environ. Toujours à 19°C, une cuillère supplémentaire d’eau vaporisée le fait dépasser les 70% de HR !

Dans une maison non étanche, cette humidité s’échappe – certes de manière incontrôlée et avec beaucoup de chaleur – par les mêmes fuites qui laissent s’enfuir l’air chaud… avec les effets délétères décrits ci-avant ! En étanchéifiant, il faut donc prévoir un système de renouvellement d’air volontaire et maîtrisé.

Le confort, cet objectif souvent oublié

L’étanchéité n’est pas qu’une question d’économie d’énergie, c’est aussi et surtout une affaire de confort. Un bâtiment “étanche” limite drastiquement les courants d’air parasites, un des premiers éléments indésirables générateur de ressenti d’inconfort l’hiver et susceptibles de perturber ou gêner un bon renouvellement de l’air intérieur. Le confort thermique optimal est atteint lorsque nous combinons une température modérée (environ 19°C) avec un taux d’humidité relative adéquat (environ 55%), une température stabilisée et une absence de courant d’air intérieur. Dans ces conditions, 95% de la population ressent un bien-être thermique. Et pour maintenir ces conditions idéales, l’étanchéité est incontournable ! Sans elle, les variations de température et d’humidité deviennent difficiles à contrôler.

Nous avons pu constater, suite à de nombreuses analyses de bâtis, que l’amélioration de l’étanchéité permettait de réduire la température de chauffage de 1 à 2°C tout en augmentant la sensation de confort… Voilà un aspect de l’efficacité énergétique (et donc économique) peu connu et, surtout, peu étudié et conseillé !

Étanchéité à l’air : comment procéder concrètement ?

L’étanchéification d’un bâtiment existant n’est pas forcément un chantier titanesque (en tout cas dans le neuf, voire dans des rénovations d’ampleur… si les points ci-après sont bien pris en compte avant la réalisation des travaux). Voici quelques points d’attention prioritaires :

  1. Menuiseries extérieures : vérifier les joints, installer des bandes d’étanchéité compressibles pour les fenêtres anciennes, et ne pas négliger les coffres de volets roulants qui sont souvent de véritables passoires.
  2. Traversées de parois : reprendre l’étanchéité autour des gaines électriques, tuyauteries, conduits de ventilation qui transpercent l’enveloppe du bâti.
  3. Jonctions entre éléments constructifs : assurer la continuité de l’étanchéité entre les murs et les planchers/plafonds, particulièrement au niveau des rives de plancher.
  4. Trappes et accès : équiper les trappes d’accès aux combles ou aux gaines techniques de joints compressibles.
  5. Prises électriques sur murs extérieurs : installer des boîtiers étanches ou des membranes spécifiques.

L’objectif n’est pas forcément la perfection absolue (qui, entre autres lors de la rénovation de bâtis existants, serait  souvent difficile à garantir).
En effet, compte tenu de sa complexité, cette recherche de perfection pourrait engendrer des dépenses importantes et des consommations de ressources tout aussi importantes… l’une et l’autre devenant ainsi non ou difficilement amortissables (vidéo) au vu des économies tant d’énergie que financière, génbérées du fait d’une meilleure exploitation du bâti.
Un test d’infiltrométrie, réalisé par un professionnel, permet de quantifier les fuites et d’identifier les zones problématiques.

Le renouvellement d’air maîtrisé : le complément indispensable

Attention ! Étanchéifier sans prévoir un renouvellement d’air contrôlé serait une erreur grave. En effet, nous avons besoin d’air frais pour respirer, évacuer les polluants intérieurs, le CO2 en excès, les microparticules en suspension dans l’air et gérer l’humidité relative de l’air ambiant.

C’est là qu’intervient le renouvellement d’air contrôlé (Ventilation naturelle, VMC, VMI…). En extrayant l’air vicié (trop humide) et en introduisant de l’air neuf (moins chargé en humidité que l’air intérieur), nous générons un habitat sain et confortable. Contrairement aux idées reçues, l’air extérieur, même froid, contient généralement moins d’eau (sous forme de vapeur) que l’air intérieur chauffé.

De plus, le renouvellement d’air contrôlé est économiquement plus intéressant que de chauffer de l’air qui pénètrerait de façon anarchique pour compenser des fuites non ou insuffisamment  maîtrisées. Pour vous donner un ordre de grandeur, le coût annuel pour chauffer les 8 renouvellements d’air par jour dans un appartement de 100 m² s’élève à environ 330 euros (avec un coût de l’électricité à 20 centimes par kWh).

L’équilibre subtil entre étanchéité à l’air et perméabilité

Il est important de ne pas confondre étanchéité à l’air et imperméabilité à la vapeur d’eau. Un bâti sain doit être étanche à l’air mais perméable à la vapeur d’eau (ce qu’on appelle la perspiration). Cette distinction est cruciale, particulièrement dans les bâtiments anciens qui fonctionnent souvent selon ce principe.

Dans les constructions modernes, nous utilisons des membranes « pare-vapeur » ou « frein-vapeur » qui régulent le passage de la vapeur d’eau tout en assurant l’étanchéité à l’air. Ces membranes doivent être posées avec grand soin, car chaque défaut peut devenir un point de condensation problématique.

Pour les bâtiments anciens, l’approche doit être plus nuancée et tenir compte des spécificités du bâti existant. Une étanchéification excessive et mal pensée peut parfois créer plus de problèmes qu’elle n’en résout ! C’est pourquoi nous recommandons toujours une analyse globale du bâti par un professionnel habilité et formé à cet effet avant d’entreprendre des travaux.

Conclusion : l’étanchéité, pilier d’un habitat performant et sain

L’étanchéité à l’air constitue donc un élément fondamental pour créer un habitat économe en énergie, confortable, sain et durable. En contrôlant les flux d’air, nous pouvons mieux gérer la température, l’humidité et la qualité de l’air intérieur.

Cependant, n’oublions jamais que l’étanchéité n’est qu’un élément d’un système plus global. Elle doit être pensée en complémentarité avec l’isolation, la ventilation, le chauffage et tant d’autres éléments, à commencer par le confort des occupants. C’est cette approche holistique que nous défendons depuis des décennies, car nous pu constater ses bénéfices concrets sur le terrain.

Si vous souhaitez approfondir ces questions, nous vous invitons à consulter nos ouvrages « Maison écologique, construire ou rénover » et « Les clés du confort thermique écologique », ou à télécharger gratuitement l’ebook « Le confort » disponible sur le blog “Soigner L’Habitat“. Vous y trouverez des explications plus détaillées ainsi que des solutions pratiques pour améliorer votre habitat.

L’étanchéité à l’air est souvent le chaînon manquant entre une trop forte consommation d’énergie ainsi qu’un faible confort thermique global faible par comparaison à un habitat véritablement pertinent. Ne la négligez pas !

Claude Lefrançois


Après 30 ans dans le bâtiment, ancien charpentier, ancien constructeur, ancien maître d’œuvre, formateur dans le bâtiment, expert en analyse des bâtis anciens avant travaux, auteur de nombreux articles et d’un livre “Maison écologique : construire ou rénover” aux Ed. Terre vivante, auteur de 2 ebooks disponibles sur mon blog, je suis désormais retraité.
Je mets mon temps disponible et ma liberté d’expression à votre service : j’observe et j’analyse, au besoin je dénonce ou émet des idées.
Bonne lecture.

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